22 avril 2013 - La Dépêche
Jean-Alain Mariotti est président de la section aménagement durable du territoire au Conseil économique et social (CESE). /Photo DDM./J.-M. Mazet (archives)
L'avis du président de la chambre de commerce et d'industrie sur la ligne à grande vitesse, sur la nécessité d'être à trois heures de Paris, et sur la modernisation de la RN 21.
Vous venez de rencontrer Philippe Duron (*) au titre du conseil économique et social où vous siégez. Vous avez eu des assurances ?
Il m'a confirmé que la décision portant sur les priorités en matière de transports sera rendue publique en juin. La commission qu'il préside est chargée de phaser la liste de priorités pour les projets de lignes à grande vitesse mais pas seulement. En revanche, il ne m'a pas caché que les membres de cette commission manquaient selon lui d'informations chiffrées concernant deux projets majeurs, l'axe Lyon-Turin et le Grand Paris des transports. D'où son incapacité à pouvoir en mesurer l'impact financier et ses répercussions sur les autres projets comme la Bordeaux-Toulouse. En revanche, si ces deux projets sont maintenus, il ne restera rien ou presque des 245 millards de l'enveloppe pour les 20 ans à venir.
Avez-vous eu par ailleurs confirmation que les deux projets Bordeaux-Hendaye et Bordeaux-Toulouse sont scindés ?
Non, je n'ai pas d'information dans ce sens, mais je rappelle que le conseil régional a conditionné son financement de l'étude à ce qu'elle reste globale
[…] . Le gros problème sur Bordeaux-Paris reste le partenariat public-privé et la mise en place des péages par la SNCF. Il ne faut pas que le coût de ces péages provoque une augmentation des tarifs et que voyager sur Bordeaux-Paris coûte finalement plus cher que l'avion.
Avez-vous le sentiment, comme d'autres, que le POLT (Poitiers- Orléans -Limoges-Toulouse) revient à l'ordre du jour ?Le problème de fond, c'est le temps nécessaire à un territoire pour rallier Paris en trois heures. Le POLT ne permet pas ces trois heures. Pour ma part je reste vigilant afin qu'on ne soit pas comme les vaches en Belgique, qui regardent passer les trains. Si elle se fait dans ces conditions, la LGV n'est pas pour les Agenais. C'est-à-dire ? Si la ligne à grande vitesse se concrétise, elle va tout changer. Elle nous mettra certes à trois heures de la capitale, mais à 30 minutes environ de Toulouse et de Bordeaux. Si on est intelligent dans le domaine de la fibre optique également, c'est une nouvelle organisation du territoire et du développement économique qui se profile à vingt ans. Vous affirmez aussi que l'avenir passe par le bassin de vie agenais… Tous les projets sont autour de l'Agropole. Le management et l'organisation des projets qui sont lancés aujourd'hui, désolé de le dire mais nous, les entreprises, on s'en fiche[…] Si la LGV ne se fait pas, on devra s'organiser autrement. Si c'est oui, le pire serait de ne pas prévoir. Les opposants expliquent par l'exemple qu'une gare TGV et une ligne à grande vitesse n'amènent pas de développement économique. Je ne dis pas que les gares betterave perdues dans les champs n'existent pas. Mais on est à Agen, avec une gare rive gauche qui se trouve dans l'agglomération et un deuxième échangeur autoroutier qui se profile. Les chefs d'entreprise savent que le contact physique est essentiel pour les relations commerciales[…] En revanche, je suis un peu dubitatif sur les retombées économiques directes. Que pensez-vous de l'aménagement des lignes existantes, thèse défendue par les opposants à la LGV ? Si la LGV ne peut pas être financée, et j'ai des craintes sur ce point, pourquoi pas? En revanche, si LGV il y a, on doit réfléchir à libérer les lignes anciennes pour mettre en place des faisceaux susceptibles d'accueillir le frêt de marchandises agricoles ou le transport de matières premières.[…] Plus globalement, il ne faut pas que l'Aquitaine devienne le doigt gelé de l'Europe.
(*) Député du Calvados, Philippe Duron préside la commission mobilité 21 chargée de définir la liste des priorités en matière d'infrastructures de transports, ferroviaires, routiers, etc.