Une heure gagnée pour aller de Toulouse à Paris en train vaut-elle l’artificialisation de plus de 3 000 hectares de terres et un investissement estimé en 2020 à 14 milliards d’euros d’argent public ? La réponse est « non », ont chanté en chœur ce samedi 23 septembre les opposants au projet de ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse/Dax.
Réunis à Balizac, en Sud-Gironde, village promis à être coupé en deux par les rails et condamné à regarder passer les trains à plus de 300 km/h, quelque 300 manifestants participaient à la Sarabande.Cette grande caravane festivepartie vendredi 22 septembre soir de Bordeaux rejoindra Bernos-Beaulac ce dimanche. Avec comme fil rouge, la vallée du Ciron, sanctuaire naturel où 17 viaducs de béton seront construits au-dessus de la rivière et de ses affluents pour faire passer le train.
L’avis très critique sur le projet rendu début septembrepar l’Autorité environnementale a regonflé le moral des troupes. Même si tous les recours juridiques ont été levés, les opposants ne s’avouent pas vaincus etprient pour que l’Europe ne verse pas les 2,8 milliards d’euros promis au financement.
Marina Dutruy est venue de Bordeaux. « La vallée du Ciron est un espace de ressourcement, d’évasion. Je suis outrée par ce projet pharaonique. On a voulu une métropole à 1 million d’habitants, mais aujourd’hui on ne peut plus circuler, rien n’a été anticipé. La priorité, ce sont les trains du quotidien, tout le monde s’en fiche de gagner quelques dizaines de minutes pour aller à Toulouse. »
« On a voulu une métropole à 1 million d’habitants, mais aujourd’hui on ne peut plus circuler, rien n’a été anticipé »
Des grandes cartes détaillées du futur tracé sont exposées. Elles montrent la réalité d’un territoire forestier aujourd’hui ouvert qui demain sera grillagé. C’est le prix « de l’éloge de la vitesse » que les opposants fustigent. « La SNCF va proposer des trains plus lents mais moins chers entre Bordeaux et Paris, mais pour le président de Nouvelle-Aquitaine Alain Rousset et la présidente d’Occitanie Carole Delga, il faut aller vite. Pourquoi ? On ne sait pas. Mais faut que ce soit rapide. C’est le cœur de leur projet », single Renaud Antunes, du collectif Stop LGV Bordeaux-Métropole.
« Le vent tourne »
« Nous, on n’oppose pas les métropoles aux territoires ruraux. C’est pour ça que la Sarabande est partie de Bordeaux. Tout le monde est concerné par ce projet qui n’a aucun sens », rameute Pauline Dupouy, l’une des porte-parole du collectif LGV Nina (Ni ici, ni ailleurs). Depuis un an et demi, ça bouge, on tisse des liens sur tout le tracé, les élus sont là. On sent que le vent tourne. Les grands projets inutiles sont de plus en plus médiatisés. »
Plusieurs élus ont aussi pris la parole. Des maires, mais aussi la conseillère régionale EELV Christine Seguineau tout comme le député LFI Loïc Prudhomme. La maire de Bernos-Beaulac promet de ne pas arrêter la lutte « tant que les bulldozers ne seront pas devant sa mairie ».
Un peu à l’écart, Aurélie Malard et Maxime Aguirre écoutent. Ils sont voisins à Balizac. Si la LGV se fait, ils seront coupés du bourg et aux premières loges pour entendre passer le train. « Quand on s’est installé, on pensait que le projet ne se ferait plus. »