15 décembre 2014 - Sud Ouest
NdlR: TGV Albret : Soutenons Joseph Bonotto .
Commentaire d'un lecteur : Pourquoi ?
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Les compétences de chacun sont mises à contribution au service du collectif : hier, il s’agissait de construire un nouveau tipi, un des hébergements des zadistes sur place.
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Les traits de la vingtaine de personnes sont à peine tirés et l'enthousiasme des prémices de ce nouveau combat n'est pas encore retombé.
Si l'agitation et la curiosité suscitées par cette entreprise ont attiré durant quelques heures, samedi, personnalités politiques, associatifs et militants venant de loin, eux restent « pour résister sur la zone à défendre (ZAD) ». Une résistance qu'ils comptent bien inscrire dans la durée, faisant taire les mauvaises langues misant sur les rigueurs hivernales pour accélérer leur départ. Après avoir monté un premier tipi samedi matin, un deuxième était en construction hier, dans la joie et la bonne humeur, promouvant haut et fort les vertus du travail collectif.
Propositions refusées
La ZAD de Sainte-Colombe-en-Bruilhois a d'abord vu le jour dans l'esprit de Joseph Bonotto dont près de 12 hectares de terres sont impactés par le tracé de la future LGV et le projet de Technopole Agen-Garonne (TAG). Ayant refusé la proposition de rachat faite par l'Agglomération d'Agen, « une honte à moins de 3 euros le mètre carré », l'agriculteur a réussi à fédérer autour de lui le réseau zadiste, installé en toute légalité sur ses terres. « Samedi soir, j'ai pris la mesure de l'émotion qui m'envahissait devant la mobilisation de tous ces jeunes venus chez moi », confie Joseph Bonotto, connu pour être plus bourru, tandis que les acteurs de la mobilisation, attablés autour d'un café dans son hangar, devisent sur l'avenir de la planète. L'Agglo d'Agen a, de son côté, déjà avancé que les propositions faites à Joseph Bonotto, toutes refusées, se sont notamment heurtées à la volonté de l'exploitant agricole d'être lui-même aménageur de ses terres. « D'un côté, ce propriétaire hurle contre la zone, de l'autre, il veut y faire des aménagements », a appuyé Henri Tandonnet vice-président de l'Agglo, il y a quelques jours dans nos colonnes.
Nous proposons une alternative et occupons les sols que l'on défend. On est le dernier rempart contre le capitalisme
Désillusion politique
Mais qui sont ces zadistes installés depuis quarante-huit heures à Sainte-Colombe-en-Bruilhois ? Si les profils sont variés, les premiers arrivés sur placesont majoritairement du Sud-Ouest et brandissent aisément comme point commun la défense de la terre. D'ailleurs, ce n'est pas le froid ou quelques gouttes qui vont ralentir leur détermination. « S'il pleut, ce n'est pas grave, on n'est pas en sucre. Et ici, c'est un peu nous et la nature contre le reste du monde. Les gens disent que l'on ne travaille pas, mais il suffit de voir tout ce que l'on est capables d'accomplir ensemble. »
Isabelle Grenet était engagée au Parti de gauche dans les Pyrénées Atlantiques et, par désillusion de la politique, a démissionné en janvier dernier dans le but de « résister sur le terrain. Je me retrouve dans le mouvement des ZAD car c'est la dernière solution qui reste. Nous proposons une alternative et occupons les sols que l'on défend. On est le dernier rempart au capitalisme et la preuve vivante que l'on peut faire les choses différemment, qu'une vie basée sur le partage est possible. »Mobilisée à Sivens, comme nombre de ses « compagnons de lutte » présents à Sainte-Colombe-en-Bruilhois, Isabelle se rend de ZAD en ZAD, selon les besoins. Une mobilité partagée par les habitués de ce mode de mobilisation et qui, souvent,convoquent la mémoire de Rémi Fraisse, ou encore les souvenirs de lutte à Notre-Dame-des-Landes.
Patrouilles de gendarmerie
« C'est une révolution sans chef, lâche un zadiste, qui trace un plan du futur dortoir en cours d'aménagement. Lorsque certains se contentent de parler d'Agenda 21, nous, on l'applique », ajoute ce trentenaire, souriant. Mais si l'excitation d'assister à la naissance d'une nouvelle zone à défendre est bien présente, et se veut pacifique, les forces de l'ordre gardent un œil sur le mouvement, patrouillant régulièrement dans le secteur. Pour l'heure, aucune animosité n'est apparue de la part du voisinage, certains se sont même fendus de quelques dons en nourriture ou en matériel, comme des couvertures. « Aujourd'hui, on est une vingtaine, mais on peut très rapidement être beaucoup plus. À Sivens, au début, on était deux… », mesure un des participants à la ZAD.