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LGV : les modes de financements “innovants”de M. Rousset
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11 septembre 2013 - Le Journal du Pays Basque - Par Pierre Recarte / Vice-président du CADE

NdlR TGV-Albret : Après le PPP pouri , d'autres propositions malades....

Le gouvernement a voulu rompre, selon J.-M. Ayrault, avec la “logique de grands projets pharaoniques sans le début d’un financement” suivant ainsi les rapports Bianco, Auxiette et la commission Mobilité 21.

L’objectif est de concentrer les investissements sur le réseau ferré déjà existant et sur les transports du quotidien.

De quoi faire grincer les dents de certains élus aquitains dont bien sûr Alain Rousset.


Rechercher des solutions

Trouver des financements “innovants” telle est la tâche que se sont assignés de longue date le président du conseil régional et ses “amis” socialistes aquitains.

Parmi les innovations, Alain Rousset propose “que les voyageurs puissent participer au financement de cette ligne grande vitesse à raison d’un ou deux euros supplémentaires par billet”. (Aqui 02/07/2 013)

De son côté Henri Emmanuelli, dans une interview accordée au quotidien Sud Ouest, propose le plus sérieusement du monde : “Pourquoi ne pas attirer des fonds souverains, de Chine, du Qatar ou de Singapour ?”.

Attirer des fonds privés, le mot est lâché. La solution mais aussi le danger viennent de l’Europe. Le voyage à Bruxelles, il y a quelques mois, d’Alain Rousset n’était pas dénué d’arrières-pensées…


Se tourner vers l’Europe

La Commission européenne estime que les besoins d’investissement, à l’échelle de l’Union, dans les infrastructures pourraient se chiffrer à environ 2 millions de millions d’euros !

Déjà en 2010, José Manuel Barroso, président de la Commission, proposait de recourir à l’emprunt obligataire pour mobiliser les ressources nécessaires. Cet instrument mis en œuvre par l’UE avec l’appui de la Banque Européenne d’investissement (BEI) contribuerait à combler ces besoins de financement.

Le principal objectif est d’inciter le secteur privé à contribuer davantage au financement de projets d’infrastructure, sans augmenter la participation publique pour ne pas creuser la dette. Les obligations de projet ou “projects-bonds” sont l’un des instruments financiers envisagés. Un instrument “astucieux” qui permettra de “dissimuler la dette” des Etats !


Les project-bonds : un montage complexe, un principe simple

Des crédits sont confiés par les Etats à la BEI pour qu’elle “rehausse” la qualité des emprunts obligataires, c’est-à-dire qu’elle améliore leur rémunération et atténue leur risque sur les marchés financiers. La Commission en attend un effet multiplicateur de 15 à 20. Une phase pilote a été lancée en 2012-2013, sur une base de 230 millions d’euros de fonds européens, mis à disposition de la BEI, pour financer des projets à hauteur de 4,5 milliards d’euros ! Après évaluation, il est envisagé une éventuelle généralisation à compter de 2 014.


Les project-bonds, mode d’emploi

Plusieurs entreprises répondent ensemble à un appel d’offres des pouvoirs publics pour construire, par exemple, une ligne ferroviaire et créent “une société de projet” afin de lever les fonds nécessaires.

Habituellement le financement d’un projet provient du capital apporté par les entreprises (actions) et des emprunts bancaires.

Avec les “project bonds”, la société de projet se finance grâce aux capitaux des entreprises (actions) et à l’émission de “project bonds”, obligations garanties en partie par la Banque Européenne d’Investissement (BEI) pour améliorer la notation de l’obligation (AA) et permettre d’attirer les investisseurs de long terme (compagnies d’assurance, fonds de pension, fonds souverains…).

L’objectif est de réduire ainsi le coût de l’emprunt et d’amener les investisseurs institutionnels à accepter de détenir ces obligations pour une longue période.


Les projects bonds, des bombes à retardement !

On l’a bien compris, c’est la BEI et à travers elle les États de l’Union, actionnaires de la BEI, qui portent une grande partie du risque financier et les investisseurs privés se rémunèrent sans risque.

Dans un premier temps, il faudra recapitaliser la BEI, à hauteur de 10 milliards d’euros pour lui permettre de prêter davantage sans perdre sa notation AAA. Le geste n’est pas anodin pour la France et l’Allemagne, principaux actionnaires de la BEI, il équivaut, pour chacun à débourser 1,6 milliard.

Attirer des financements privés n’allège pas pour autant la responsabilité des États qui garantissent la BEI. En d’autres termes si l’activité économique en Europe ne s’améliore pas, la BEI risque de voir sa note dégradée, et d’alourdir le poids de la dette incombant aux Etats membres.

Derrière un consensus de façade, certains économistes s’alarment car ce type d’instrument financier “s’accompagne de risques financiers considérables pour les États de l’Union ainsi que de risques inflationnistes qu’il s’agira de surveiller de près dans les prochains mois, et les prochaines années. (1)”

La BEI devrait évaluer les projets conformes aux objectifs. Mais sur quels critères ? Il faut que ces projets soient rentables et rapides à mettre en œuvre répond la Commission.

En France, toutes les LGV rentables sont construites ou en voie de l’être. Dès 2011, le rapport parlementaire d’Hervé Mariton critiquait la fragilité financière des projets de nouvelles lignes : “La réalisation des autres lignes risque de n’être finançable ni par des fonds privés du fait d’une trop faible rentabilité attendue ni par des fonds publics sous contraintes.”

La Cour des comptes a mis en garde l’Etat sur la rentabilité des LGV “bien plus faible qu’espérée initialement”, et précisait : “Si les bilans socio-économiques et financiers des LGV actuellement en projet ou en cours de construction devaient être corrigés de la même façon, ils seraient fortement négatifs.”

Il n’y a guère qu’Alain Rousset qui peut affirmer sans vergogne : “Le GPSO est le projet le plus rentable” alors qu’il n’y a jamais eu d’étude indépendante de rentabilité économique.


Les project bonds, des “toxic bonds” ?

Il y a fort à craindre que si l’Europe s’engage à faire financer par des investisseurs à la recherche de placements rémunérateurs des projets non rentables, les Etats membres ne connaissent à nouveau de graves déboires. Dès lors, on comprend mieux la réticence de l’Allemagne à développer de tels instruments financiers.

Il est à craindre que cet entêtement d’investir à tout va par des Etats surendettés en utilisant de tels montages risqués ne conduise à la construction d’une énorme “bulle de toxic bonds” dont l’éclatement sera catastrophique.

Alors après la crise due aux “subprimes”, à quand celle due aux “project bonds” ?

Les rehausseurs de crédit ont été au cœur des subprimes en proposant aux investisseurs des placements sous la notation financière la plus sûre, le AAA. Ce tour de passe-passe a fait croire à un placement à la fois sûr et très rentable.

La suite on la connaît…


1) Daria Shakourzadeh Paris School of Economics (PSE)

 

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