9 avril 2011 - Le Journal du Pays Basque par Goizeder TABERNA
“J’ai l’intuition qu’on a forcé RFF, pour le financement du projet, à imaginer un trafic qui ne s’est pas présenté”, a déclaré Hervé Mariton au micro de France Inter samedi dernier. Evoquant la LGV-Nord, ce député UMP a réalisé un flash-back édifiant. Membre de la commission des finances de l’Assemblée nationale et rapporteur spécial de la mission des transports, H. Mariton a parlé de “perspectives totalement surréalistes du Grenelle de l’environnement et du schéma national des infrastructures du transport”. Autant dire que le débat sur la pertinence des lignes à grande vitesse bat son plein.
Des motifs, il n’en manque pas. Session du 28 avril sur la participation du Conseil général, signature de la convention de financement du tronçon Tour-Bordeaux (voir encadré), baisse de 50 % du trafic du fret en 2010, campagne pour les trente ans du TGV, le débat dépasse la simple traversée du Pays Basque par une nouvelle ligne.
Artificiellement majorées
“Il faut avoir le courage de dire que certains projets ne seront pas réalisables”, lâche Hervé Mariton dans Le Figaro. “Déjà, les lignes en cours de construction supposent plus de volontarisme politique que de rationalité économique”. Sur les ondes, il a affirmé que dans certains projets, les recettes potentielles de Réseau ferré de France (RFF) et les prévisions de trafic de la SNCF vont être “artificiellement majorées” et que cela va “aggraver” la situation financière de RFF et de la SNCF.
Cela fait écho aux questions posées la semaine dernière aux conseillers généraux par le Cade : “Pouvez-vous nous dire le nombre exact de TGV qui s’arrêteront à Bayonne ? Pouvez-vous nous dire le nombre exact de TGV qui ne s’arrêteront pas à Bayonne ? Pouvez-vous nous dire le nombre exact de TGV qui s’arrêteront à Biarritz, St-Jean-de-Luz et Hendaye ?”. Et de conclure : “Si vous êtes incapables de répondre à ces questions, de quel droit allez-vous engager nos impôts dans cette aventure ?”
On en vient à l’autre aspect du débat : le financement. Avec un système ferroviaire très endetté, pour la première fois, l’Etat a demandé aux collectivités territoriales de mettre la main à la poche concernant le projet de LGV Sud Europe Atlantique (SEA). Paradoxalement, le président de RFF, Hubert du Mesnil, a déclaré dans la presse que “l’argent public devrait d’abord aller au réseau existant, les LGV ne devant être réalisées que si on a les moyens de les payer”.
30 % des lignes TGV rentables
Les élus basques sont pourtant appelés à aligner, pour l’instant, pour le tronçon Tours-Bordeaux. La Communauté d’agglomération Côte basque Adour s’est engagée à débourser 36 millions d’euros, le Conseil général doit se prononcer sur une participation de 79 millions d’euros et la Communauté de communes Sud Pays Basque, elle, n’a pas accepté de débloquer 25 millions d’euros.
En tout, les trois partenariats public-privé (PPP) signés cette année (LGV SEA, Bretagne-Pays de Loire et contournement de Nîmes-Montpellier) n’apportent en effet qu’une partie de la solution. Etat et collectivités ayant de plus en plus de mal à apporter leur complément.
A cela s’ajoute le manque de rentabilité de certaines lignes à grande vitesse existantes. “Actuellement, 30 % des lignes TGV ne sont pas rentables”, explique Barbara Dalibard, responsable de la SNCF. Décidément, le temps où les bénéfices du TGV “faisaient vivre la boîte” est révolu.
Treize collectivités signent
Treize des seize collectivités territoriales d’Aquitaine concernées par la réalisation du tronçon de la ligne TGV entre Tours et Bordeaux ont signé hier autour du préfet de région la convention de financement de la future ligne à grande vitesse Sud-Europe Atlantique. Cet ensemble de signatures représente 76 % de la contribution attendue de l’ensemble des collectivités d’Aquitaine (soit 842 millions d’euros aux conditions économiques de juillet 2009). Le coût du tronçon central de la LGV s’élève à 6 703 millions d’euros.
Ne manquaient que les signatures des départements des Landes, du Lot-et-Garonne et des Pyrénées-Atlantiques, qui, “en raison des récentes élections cantonales, ne devaient soumettre le texte au vote de leur assemblée qu’à la fin du mois d’avril”, informe la préfecture de région. La Communauté de communes Sud Pays Basque n’avait pas signé le protocole d’intention.
En même temps, le gouvernement s’engage à ce que les collectivités ne déboursent que “le strict nécessaire”.