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Contribution de ASPA
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27 novembre 2014 - par Jean Paul Damaggio

Association de Sauvegarde du Patrimoine d’Angeville

Le dossier du maître d’ouvrage du GPSO version 2005 aurait dû être mis dans les documents de l’enquête d’utilité publique pour saisir les écarts monumentaux qui existent entre les intentions et les actes, intentions qui cependant furent à la base de l’acceptation du choix de la LGV !

Depuis 2005 en effet, les défenseurs du projet ne cessent de répéter qu’il n’y a plus à le remettre en cause, puisqu’il a été décidé à partir d’un débat, que nous jugeons faussé, à cause du changement de cadre politique et financier, suite à la crise de 2008, et compte-tenu des évolutions technologiques (vidéoconférence, covoiturage…). Nous nous proposons de le démontrer ici.

Rappelons d’ailleurs que le délai entre débat public et EUP a été dépassé, preuve qu’en 2005 il y a eu de la précipitation par rapport à la connaissance du sujet de la part de RFF, sinon en deux ou trois ans on pouvait passer de ce débat à l’EUP.

1 ) En 2005, le débat portait sur Bordeaux-Toulouse et non sur l’ensemble du GPSO (pour Bordeaux-Hendaye le débat s’est produit un an après) ce qui provoque des décalages rendant parfois difficiles la compréhension des données. L’exclusion récente de la branche Dax-Hendaye complète encore la difficulté quand on apprend en plus qu’elle coûterait 4 milliards d’euros !

2 ) Dès le départ le dossier de 2005 fait apparaître que le transport des voyageurs en France est de 9,4% par le ferroviaire, de 3% par l’avion et de 87,6 % par la route (p. 18). Il est donc évident que le concurrent majeur du fer c’est la route, or le « tout LGV » vise d’abord à concurrencer… l’avion ! Or, depuis 2005, les tarifs de l’avion ne cessent de baisser, les tarifs du rail ne cessent d’augmenter et le pouvoir d’achat des Français est en berne. Conséquence logique : le critère majeur de la mobilité est moins la vitesse que le prix ! il faut donc réorienter les projets ferroviaires vers la priorité aux lignes existantes qui offrent des tarifs plus bas, objectif que les autorités ne cessent de répéter, sans suite dans les actes : DUP actée par les autorités pour le Lyon-Turin en 2013, DUP en voie de signature pour Limoges-Poitiers, LGV pourtant renvoyée après 2030 par la commission Duron, et objectif de signature de la DUP du GPSO en 2016 ! S’orienter à nouveau vers trois chantiers LGV comme pour la période 2012-2017 nous semble donc une erreur.

Pour concurrencer la route, priorité aux lignes existantes.

3 ) Passons au flux de voyageurs à partir de Montauban, tel qu’il est évoqué page 29 du dossier pour l’année 2002. Bizarrement les données oublient le lien avec l’Ile de France par Limoges !

On y annonce 318 000 voyageurs vers l’Ile de France par Bordeaux avec 43% pour le fer, 29% pour la route et 28 % pour l’avion. A bien lire ce document on découvre qu’en fait, seulement 282 000 vont au-delà de Bordeaux. Le flux est nettement plus important vers le sud : 863 000 avec seulement 16 % pour le fer. Donc un projet pour aider le rail à prendre des parts de marché devrait d’abord améliorer les liaisons vers le sud et en veillant à avoir un ferroviaire peu cher, pour aider les familles, ce qui est le cas de la ligne POLT. Comme la SNCF ne communique pas le nombre de voyageurs sous prétexte de « secret industriel » (RENFE communique largement) on ne peut que se référer à des documents annexes pour évoquer l’impact de la ligne POLT[1].

Un document de 2010 des trois CSERs mentionne 2 800 000 voyageurs par an sur la ligne mais il est difficile de savoir la part concernée au départ de Toulouse ou Montauban. Si on s’en réfère au nombre de trains nous sommes dans un dispositif mentionné page 32-33 du dossier : soit six par Bordeaux et trois par Limoges plus le train de nuit (donc dix arrêts par sens soit 20 au total), alors que tout le marketing de la SNCF pousse le voyageur à éviter la POLT (données tendancieuses comme nous le verrons plus loin). Pourquoi ce maintient de la POLT ? Car, le critère est plus le prix que la vitesse, pour la plus grande partie des voyageurs ! Et quand c’est la vitesse, le prix de l’avion arrive à être inférieur à celui du TGV suivant la date où on prend le billet. A partir du moment où la LGV Bordeaux-Toulouse implique d’en finir avec la concurrence de la POLT (la SNCF programme dès à présent pour 2017 la limitation de la POLT à Paris-Brive), ça signifie très clairement qu’elle va continuer de favoriser… la route chez tous ceux qui, faute de ressources, ne paieront pas le billet TGV !

4 ) La page 30 du dossier 2005 se base sur le cas de Toulouse. On y annonce un flux de 3 966 000 voyageurs avec 19 % pour le fer, 17 % pour la route et 64 % pour l’avion. Pour l’avion, on passerait de 28% à 64 % en passant de Montauban à Toulouse ! Nous doutons totalement de tels chiffres ! (il est précisé d’ailleurs que seul le flux ferroviaire Bordeaux-Toulouse est pris en compte, une fois encore la POLT n’existe pas !)

C’est par cette page 30 qu’on en arrive à la conclusion : il faut la LGV pour concurrencer l’avion !

5 ) Le chapitre suivant démontre que la ligne existante ne peut satisfaire au critère de la vitesse. On apprend page 33 « qu’une trentaine de trains de fret circule chaque jour dans les deux sens sur cet axe.». En juin 2014 les chiffres RFF indiquent onze trains. Et il faudrait noter que les travaux sur Bordeaux-Tours dévient actuellement quelques trains par Montauban puis Limoges. Même mieux, nous lisons en 2005 pour Montauban-Toulouse (page 33) : « C’est donc une soixantaine de trains de fret qui circule chaque jour dans les deux sens sur la section Montauban-Toulouse (données 2002). Nous sommes très loin de vingt-et-un qui ressortent du document 2014 de RFF !

Pour les trains grandes lignes (TGV, Corail, Teoz) nous étions (page 32) pour Bordeaux-Toulouse à "seize trains par jour dans les deux sens qui effectuent le trajet en 2 heures" (soit 32 dans les deux sens). En fait c'est trente trains par jour (juin 2014 RFF). Pour Montauban-St Jory on passe à 44 trains par jour ce qui implique 14 trains qui partent vers Limoges et non  3x2 annoncés en 2005 !. Or il y a seulement 12 TGV qui partent vers Bordeaux !

Bref, nous lisons : « Le développement des différents types de circulation risque de provoquer des conflits d’usage des sillons et d’entraîner une saturation de la ligne, notamment, aux heures de pointe du matin et du soir. » Le mot est lâché : SATURATION ! Puis il est aussitôt nuancé : « notamment… »

Faut-il pour 60 km de lignes chargées pendant un temps très bref construire plus de 200 km de LGV ? N’y-a-t-il pas d’autres solutions ? N’existe-t-il pas des TER à deux étages ? Si le souci des tronçons les plus chargés est si grand, pourquoi le débat public sur le tronçon Saint-Jory-Matabiau a-t-il eu lieu presque dix ans après le débat sur la LGV ? La nécessaire amélioration de l’infrastructure aux abords de Toulouse et Bordeaux n’est rien d’autre qu’un des prétextes pour justifier l’inutile LGV !

Cette question de la saturation est sous-entendue page 45 et page 46 jusqu’à ce que l’étude Claraco démontre que la ligne n’est absolument pas saturée fait reconnu par RFF, mais les élus n’en sont pas informés.

6 ) A la page 40 du dossier de 2005 on apprend que la compétitivité du rail c’est de centre ville à centre ville. Donc c’est un bon point pour les lignes existantes mais un mauvais point pour les LGV ! Si Bordeaux et Toulouse gardent la gare en centre-ville, ce n’est pas le cas pour Montauban et Agen, preuve qu’il s’agit de gare de seconde catégorie. En conséquence combien de trains vont passer sans s’arrêter et combien vont s’arrêter ?

7 ) Page 54 du maître d'ouvrage de 2005 on apprend : "Ces aménagements complémentaires au projet représentent un investissement de 118 millions d'euros." Il s'agit des aménagements au sud de Bordeaux et au nord de Toulouse. Et ces aménagement à 118 millions sont prévu à présent à 1 178 M€ soit 10 fois plus ! Où sont les explications ?

8 ) A la page 56 du dossier de 2005 on apprend que « sur l’axe Toulouse-Montauban-Agen, le plan régional prévoit de passer de 32 trains par jour en décembre 2004 à 150 sur la section la plus chargée à long terme. » Dans les cahiers d’acteurs Brigitte Barèges et Jean-Michel Baylet ont traduit « à long terme » par « d’ici cinq ans ». Or en dix ans ce nombre de TER est passé de 32 à 31 d'après les données RFF (juin 2014) ! En fait, comme toutes les données de 2005 même le 32 TER était surévalué car depuis il y a tout de même quelques TER en plus ! L'expression "à long terme" est si généreuse que même le document de l'EUP ne prévoit au mieux que 92 trains en 2032 !

9 ) La page 64 du dossier n’a été sans doute lu par aucun élu.

Elle affiche 3 h 28 pour Montauban-Paris avec arrêt à Agen et Bordeaux.

A ce moment là le temps d’arrêt correspond à 7 minutes (3h 07 direct et 3 h 14 avec UN arrêt à Bordeaux).

Depuis le temps d’arrêt correspond à 10 minutes dans le document de l’EUP : 3 h 07 direct et 3 h 28 pour deux arrêts. Les cheminots disent 15 minutes entre le temps de décélération, arrêt lui-même et accélération.

Enfin le document actuel indique 3 h 10 Montauban-Paris avec arrêt à Agen et Bordeaux. Or même avec 10 minutes d’arrêt par gare à Agen et Bordeaux, ça fait au total Toulouse-Paris à 3 h 37 donc 27 minutes pour faire Toulouse-Montauban ?

Dans tous les cas nous sommes loin du 2 h 40 évoqué par Madame Barèges devant les caméras de France 3 le 12 janvier 2014 dans un débat sur les municipales. Aucun de ses opposants n'a d'ailleurs réagi !

Le fait d'avoir répété sans cesse, Toulouse-Paris en 3 heures, puis en 3 h 10, a trompé tout le monde car le citoyen ordinaire n'a pas imaginé un temps sans AUCUN arrêt de Toulouse à Paris.

10 ) Les coûts se trouvent à la page 71 avec un total de 2,8 à 2,9 milliards d’euros. Avec cette note page 89 : « L’étude du plan de financement du projet d’infrastructure n’intervient en effet qu’au moment de la phase d’APS et fait partie intégrante du dossier d’enquête préalable à la Déclaration d’utilité publique. »

Nous savons que ce point n'a plus à être respecté. A lui seul, il justifiait la nécessité de refaire le débat de 2005 car quand de tels engagements ne peuvent plus être tenus, c'est bien que nous sommes dans un autre monde.

Cette visite du document de 2005 ne prétend pas être exhaustive mais les points évoqués sont suffisamment graves pour mettre en doute la façon dont a été obtenu l'appui des élus en faveur de la LGV, appui dont ils ont du mal à se dédire aujourd'hui quand, pourtant, le dernier rapport de la Cour des comptes dénonce dans le chapitre 2 : "Un processus de décision tendu vers la réalisation systématique de nouvelles lignes".

En espérant avoir éclairé, sur ce seul point généralement oublié, votre approche de l'EUP, et en espérant des justifications convaincantes de RFF, recevez nos sincères et respectueuses salutations.



[1] Document des CSERs Centre Limousin Midi-Pyrénées : Une nouvelle ambition pour la ligne POLT 14 juin 2010

 

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