1 mars 2017 - france.attac.org
Mardi 28 février a été inaugurée la ligne à grande vitesse (LGV) Tours-Bordeaux, qui mettra Bordeaux à 2 heures de Paris dès juillet. Les médias annoncent un investissement de 7,6 milliards financé à 100 % par le partenaire privé (Lisea, filiale de VINCI) qui percevra donc la totalité des recettes (sous forme de péages payés par la SNCF) pendant 44 ans, durée de la phase « exploitation » du contrat de concession.
Cette inauguration est l’occasion de dénoncer – une fois de plus ! – le scandale des partenariats publics-privés (PPP), ces montages financiers qui permettraient « d’optimiser le partage des risques entre le public et le privé et de mobiliser de nouvelles ressources financières privées afin de réaliser des grands projets d’utilité nationale » . Qu’en est-il vraiment ?
Photo : Wilfried Joh, licence Creative Commons BY-NC-ND 2.0.
Un investissement financé à seulement 32 % par le privé
Un communiqué de presse VINCI et Réseau ferré de France (RFF) du 16 juin 2011 [1] détaillant le montage financier, laisse entendre que Lisea, apportant 3,6 milliards sur 7,6 milliards, contribue presque à la moitié du financement de l’investissement.
Malgré un montage financier opaque dont les détails sont protégés par le secret industriel et commercial, on peut voir que cet apport est abusivement gonflé par l’incorporation des 1,2 milliards d’euros que la société devra payer sur ses emprunts. Lisea n’apporte en réalité que 2,4 milliards d’euros (fonds propres et emprunts), le reste étant des subventions publiques (42 %), ou encore des investissements de SNCF Réseau (26 %).
Un partage des risques scandaleusement favorable au privé
Comme le révèle le Canard enchaîné dans son numéro du 20 juillet 2011, « Les risques supportés par le constructeur se révèlent des plus modestes ».
Lisea n’apporte que 772 millions de fonds propres, et emprunte tout le reste sous forme de crédits bancaires garantis par l’État et RFF, d’où un transfert des risques du privé au public. Enfin, « le contrat de concession limite la responsabilité financière de VINCI à 350 millions, soit 4,5 % de l’addition finale ».
Et pourtant la totalité des profits est pour le privé
Le concessionnaire, qui contribue donc pour moins d’un tiers à l’investissement, engrangera la totalité des recettes d’exploitation ! Et des recettes gonflées puisque « les péages devraient presque doubler par rapport à la situation actuelle » [2].
SNCF Réseau, par contre, bien que contribuant au financement pour 26 %, voit non seulement disparaître toute recette sur ce tronçon mais subira une perte de 100 à 200 millions par an. En effet, malgré des études faisant apparaître que 13 allers-retours directs par jour suffisaient largement, Lisea en a obtenu 19 pour garantir la rémunération de ses actionnaires.
Chaque TGV circulant sur la ligne creusera donc un peu plus le déficit de la SNCF, plombant sa capacité à investir et entretenir le réseau existant. Mais le contrat enrichira les actionnaires de Lisea pendant presque un demi-siècle. La rémunération annoncée des apports d’actionnaires est de 14 % !