6 juin 2011 - La Dépêche -par MICHEL PRADEAU
Raymond Girardi et Bernard Faucon-Lambert voient leur combat conforté par un rapport parlementaire qui ne plaide pas en faveur de la LGV./Photo
Morad Cherchari.
Le projet de liaison ferroviaire à grande vitesse pourrait prendre du plomb dans l'aile, suite au rapport du député UMP Hervé Mariton.Raymond Girardi, Bernard Faucon-Lambert, coprésident du collectif d'élus « Alternative LGV » et leur secrétaire, Michel Ponthoreau, peuvent arborer un sourire lumineux : l'action qu'ils mènent « non pas pour s'opposer à la création de la Ligne à grande vitesse, mais pour étudier le coût de l'amélioration de la ligne existante », comme ils le rappellent, vient de prendre une plus-value inattendue depuis la parution d'un rapport parlementaire, en date du 18 mai dernier, présenté à la commission des finances de l'Assemblée nationale par Hervé Mariton, député UMP de la Drôme.
Il est constaté en page 7 de ce rapport « la fragilité financière du schéma et la part trop grande faite à la création d'infrastructures nouvelles au détriment de la régénération de l'existant ». Autrement dit, la LGV, dans la globalité des projets envisagés en France, qui comprennent donc l'axe Bordeaux-Toulouse, coûte trop cher.
Aménagement des lignes existantes
A contrario, cela relance la thèse de l'aménagement des lignes existantes, nonobstant la suppression de passages à niveau (93 entre Bordeaux et Toulouse) et l'aménagement de portions pour permettre au TGV d'atteindre la vitesse optimale de 220km, la solution préconisée par « Alternative LGV ». « À croire que M. Mariton a pris connaissance de notre combat et de l'étude comparative que nous faisons réaliser pour en tirer les conclusions que nous pressentons : 103 millions d'euros pour l'ensemble des projets de LGV en France, 4 milliards rien que pour la section Bordeaux-Toulouse pour un TGV dont on maintient qu'il ne fera que passer dans le Lot-et-Garonne, c'est cher payer un ouvrage qui nous ferait gagner au bas mot dix minutes entre Bordeaux et Toulouse ! » appuient-ils avec une force décuplée depuis qu'ils ont les documents officiels en mains. Les voilà aujourd'hui confortés dans leur combat.
« Des arguments on en a, mais on nous a pris pour des doux rêveurs archaïques. Je me souviens encore des regards condescendants portés sur nous. Ces documents mettent en valeur notre honnêteté intellectuelle », déclare Bernard Faucon-Lambert, le président de la communauté de commune du Val d'Albret, frappé de plein fouet par le projet de LGV tel qu'il se présente. Se présentait ? Il convient toutefois de continuer à en parler au présent tant le rapport soumis aux argentiers de l'Assemblée nationale n'a rien d'un document définitif.
Déficit chronique
« N'empêche qu'il est lourd de conséquence, on y apprend par exemple que les investissements ne seront rentables qu'à 35 % pour la ligne Bordeaux-Toulouse, à 55 % pour la ligne Paris-Bordeaux. Il faudrait alors mobiliser des fonds publics qui ne feraient qu'engendrer un déficit chronique contraire au statut d'établissement public », soutient Raymond Girardi, sachant que Réseau Ferré de France, qui est déjà bien endetté, n'a pas besoin de ça…
Augmenter le prix du billet ? Cela reviendrait à se priver d'une grosse partie de la clientèle qui privilégierait les vols low-cost des compagnies aériennes de plus en plus compétitives face au rail. Toutes les études précédentes ont tablé sur des estimations de fréquentation qui se sont avérées bien en dessous des prévisions escomptées : 35,8 millions de passagers pour l'Eurotunnel selon des estimations datant de 1994, pour 14,9 millions de personnes en réalité en 2003 ; 38,7 millions de voyageurs estimés lors de l'enquête publique pour la LGV Nord pour finalement 22,6 millions de passagers en 2010.
Les études tablent sur près de 2,9 millions de voyageurs, ce qui laisse plus que sceptique Raymond Girardi : « La métropole toulousaine compte trois millions d'habitants. Si la LGV parvient à faire voyager 1,5 million de passagers, ce sera déjà très bien » ironise le président des coteaux et landes de Gascogne qui avait choisi Marmande pour tenir une conférence de presse sur cette « bonne nouvelle » descendue de Paris.
Marmande qui serait rayée de la carte ferroviaire si la LGV venait à voir le jour. Son avenir semble s'être peut-être obscurci depuis le 18 mai.