6 juillet 2016 - La Dépêche
Photo: Jean Michel Mazet
Ils y ont vécu pour la plupart pendant des mois. Appelés sur d'autres fronts, les opposants à la technopole Agen Garonne ont quitté la ZAD de Sainte-Colombe.
Cinq semaines après l'évacuation par les forces de l'ordre des maisons squattées par une quinzaine d'opposants à la technopole Agen Garonne, que sont les zadistes devenus ? «Ils n'y sont plus ? Vous me l'apprenez» dit un militant du collectif de défense des terres fertiles. Souvent présente auprès des jeunes qui composaient le mouvement, Suzanne Calmon préfère utiliser une image champêtre : «Vous savez, un zadiste est un oiseau migrateur.»
No man's land
Les oiseaux migrateurs précités ont quitté le premier nid qu'ils occupaient depuis décembre 2014, invités par Joseph Bonotto. Pas une voiture, peu ou pas de mouvements sur place hier, cinq semaines après l'expulsion par le bon demi-millier de gendarmes déployés par arrêté préfectoral le 31 mai dernier.
Pour une minorité d'entre eux, ils sont derrière les barreaux, purgeant une peine d'emprisonnement pour des délits antérieurs commis ailleurs. Une poignée est encore dans l'agglomération, libre, appliquant à la lettre l'adage qui stipule que tout bâtiment vide peut être occupé, au Passage-d'Agen par exemple.
Réseaux sociaux
Les autres ont, selon un autre membre du collectif susnommé, rejoint d'autres fronts ouverts dans la lutte contre les «projets de l'inutile» : Ce n'est pas tant à Notre-Dame-des- Landes qu'il faut les chercher, mais plutôt à Villenave-d'Ornon, où une zone à défendre vient de naître ou encore à Oloron-Sainte-Marie ou Sivens, où la Zad originelle se sent pousser de nouvelles intentions. Dans le Tarn, les décisions de justice vont, tardivement, dans le sens des opposants à l'aménagement de ce lac d'irrigation taille XXL.
«La Zad de Notre-Dame-des-Landes a besoin de renfort. Il ne faut pas avoir peur ou froid aux yeux. Il faut des gens déterminés plus que jamais. Ils vont taper fort et rapidement» peut-on ainsi lire sur Facebook, de la part d'un des meneurs de cause zadiste, le 28 juin dernier.
Sous pseudonyme, Camille Rémi Sivensi remerciait «toutes les personnes qui nous ont soutenus depuis l ouverture de la Zad (sic). La lutte n'est pas finie ; nous, occupant(e) s, avons décidé de prendre un peu de recul et de faire une pose sur l'occupation permanente de la Zad et de réfléchir à d'autres modes actions militantes pour plus d'efficacité, nous tenons à remercier (re-sic).» C'est toujours en ligne, et c'est daté du 5 juin, une semaine après l'évacuation.
«J'ai réglé le problème»
Sur place, Joseph Bonotto confirme que les Zadistes ont bien quitté les lieux. Une fois de plus, il réécrit un distinguo qui lui tient à cœur. «Les Zadistes ont une idéologie, l'ont eu hier et l'auront encore demain. On adhère ou pas. Avec d'autres, je les ai fait venir pour protéger le site et les terres environnantes. Ils sont partis, c'est leur droit, pour ailleurs.»
En revanche, «ici, ce n'était pas la zone. C'est chez moi et j'ai réglé le problème. Ces personnes n'ont jamais été les bienvenues, je n'étais pas là pour accueillir la pègre». Et Joseph Bonotto de redire sa colère «d'avoir vu que les personnes expulsées étaient rabattues chez moi. L'amalgame était facile alors, du genre Bonotto accueille les casseurs. Il faut quand même qu'on m'explique comment une trentaine de personnes est passée au travers de la sécurité alors que le dispositif empêchait la circulation, y compris de vous les journalistes. Ils ne savaient pas où aller, je les ai hébergés quelques jours».
Le 9 août, la juge des expropriations doit rendre sa décision sur le montant indemnitaire qui peut lui être accordé pour les 11 hectares, le matériel et les bâtiments lui appartenant encore.
Un nouveau collectif
En décembre 2014, en marge de l'installation des opposants qui se sont installés dans cette zone à défendre, un collectif de «défense des terres fertiles» est né de la contestation. Composé de militants et d'élus écologistes, il existe toujours mais un autre groupement est en réflexion.
À l'initiative de Suzanne Calmon, militante domiciliée à Layrac, il doit réunir «des élus de la République» contre l'endettement d'Agglo Agen. «Un collectif environnementaliste, c'est bien, mais ça ne suffit plus» explique cette Layracaise. «L'autre problème de fond, ce sont ces dépenses inconsidérées que l'on va tous payer tôt ou tard.»
Les travaux continuent
Le flot des procédures d'expulsion, les évacuations et les freins à main juridiques ont eu une conséquence : entre six et huit mois de retard pour les travaux d'aménagement préalables. Ils se poursuivent en ce début d'été., jusqu'a fin 2017 pour les phases 1 et 2.
Il s'agit en ce moment pour les entreprises de procéder au terrassement, doublé du passage des réseaux d'assainissement par exemple, sans oublier les bassins de rétention et les travaux de voirie. Juillet et août ne devraient pas ralentir la marche forcée.
En septembre, l'aménagement du G8 (giratoire de Brax) doit se poursuivre jusqu'aux portes de l'automne. Cette première phase porte sur 45 à 50 des 210 hectares (au total) de ce technopole Agen Garonne voulu par une majorité d'élus au sein d'Agglo Agen, collectivité qui porte ce projet de zone de développement économique rive gauche, à Brax et Sainte-Colombe-en-Bruilhois.