12 octobre 2012 - Le Journal du Pays Basque par Pierre RECARTE / Association Nivelle-Bidassoa
Alain Rousset, président de la Région Aquitaine, fustige une fois de plus les “partenariats public-privé” (PPP). C’était le 3 octobre, à l’occasion du renouvellement de la signature de la Charte des services publics locaux. C’est une “mécanique infernale”, s’insurge le président, redoutant, avec raison, ses effets pervers : bombe à retardement sur les finances publiques, perte de compétence et d’ingénierie pour les collectivités et PME évincées des marchés…
Déjà en avril dernier, Alain Rousset, s’adressant aux chefs d’entreprise en tant que porte-parole du candidat Hollande pour les PME et l’industrie, dénonçait les PPP qui “font entrer les acteurs publics dans un mécanisme d’endettement et ne profitent qu’aux quatre majors du BTP en excluant du système les petites entreprises et les entreprises de taille intermédiaire”.
Le PPP, une formule adulée par les élus
Un sondage réalisé par l’Ifop en 2011 montre que les trois quarts des élus de villes de plus de 10 000 habitants en ont une bonne opinion. Le principe du PPP est de confier à une entreprise la construction, puis l’exploitation et l’entretien d’un équipement de service public.
L’entreprise prend en charge les investissements puis se fait payer par les loyers versés par l’Etat ou la collectivité sur une durée souvent de plusieurs décennies. Ainsi dans l’immédiat, un investissement peut être engagé sans trop grever le budget.
Un président de Région à la mémoire courte !
C’est pourtant le même Alain Rousset, alors président de la Communauté urbaine de Bordeaux (CUB), qui a lancé, en 2006, en PPP, la construction de l’immeuble Jean-Fleuret qui regroupe les services de la CUB. L’opération a été confiée, pour 20 ans, à un groupement conduit par le groupe Fayat par le biais de sa filiale Somifa.
A la tête de la Région, Alain Rousset, pourfendeur de ces montages, va participer sans sourciller aux financements de PPP comme le futur grand stade de Bordeaux et la ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux.
De façon un peu similaire, l’A65 construite sur la base d’un “contrat de conception construction” s’apparente étrangement à un PPP bien qu’Alain Rousset, promoteur de cette autoroute déficitaire, s’en défende.
Officiellement, cette infrastructure est intégralement financée par le concessionnaire, sans recours à des fonds publics, hors apport en nature de la déviation d’Aire-sur-l’Adour.
L’intervention des finances publiques apparaît plus tard sous la forme d’une convention de financement, signée en octobre 2006, entre l’Etat, les quatre collectivités locales, dont la Région Aquitaine, et la société A’liénor, concessionnaire de l’autoroute. Cette convention prévoit une clause de déchéance qui pèse sur les collectivités. En effet, celles-ci devront verser des indemnités à A’lienor si celle-ci se retirait du projet à cause d’un manque de rentabilité.
Ainsi, comme pour la LGV Tours-Bordeaux, et bien que juridiquement il ne s’agisse pas d’un PPP, se trouve réalisée avec le plus grand cynisme la théorie de la privatisation des bénéfices et de la socialisation des pertes.
Rien ne sert de dénoncer ces montages financiers comme “une fuite en avant aux conséquences imprévisibles” si on ne renonce pas soi-même à les utiliser.
Quand on a des convictions, on les applique dans ses actions car, sinon, tout responsable politique donne corps à cette pensée de Jules Renard : “En France, le deuil des convictions se porte en rouge et à la boutonnière.”