20 septembre 2024 - Sud Ouest
Renaud Lagrave, vice-président de la Région Nouvelle-Aquitaine en charge des mobilités.© Crédit photo : R. L.
LePremier ministre est, enfin, nommé ; mais en attendantson gouvernement, nous attendons à la fois de connaître l’identité du ministre des Transports, bien sûr, mais enfin et surtout celle du ministre du Budget qui siège seul au CA [conseil d’administration] de SNCF Réseau.
Car soyons clairs : le dossier des transports sera crucial pour le futur gouvernement. Pays de tradition ferroviaire, la France a toujours misé sur son réseau de chemins de fer comme un pilier de sa mobilité et de son développement économique ; aujourd’hui et demain, il constitue l’un des fers de lance de la transition énergétique et de l’aménagement du territoire. Ainsi, notre réseau se trouve à la croisée des chemins. Au moment où nos concitoyens prennent nos trains de plus en plus massivement, l’avenir de nos rails se joue cet automne avec les engagements financiers que devra prendre l’État dans le contrat qui le lie à SNCF Réseau.
Il s’agit d’abord de sauver un patrimoine souffrant de sous-investissement massif depuis des décennies. À cet égard, le contrat de performance entre l’État et SNCF Réseau ne pourra ni se contenter de mesures timides, ni se négocier en catimini comme en 2021. Ce sous-investissement a entraîné un vieillissement préoccupant. Faute de travaux appropriés, les retards d’entretien accumulés au fil des décennies se traduisent par une dégradation de la qualité de service : incidents fréquents, limitations de vitesse, voire fermetures de lignes. Cette situation met en péril non seulement la fiabilité du réseau, mais aussi sa capacité à répondre aux besoins croissants de mobilité.
Ensuite, alors que le dérèglement climatique est devenu une priorité absolue, le réseau ferroviaire est appelé à jouer un rôle central dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Pour cela, le contrat de performance doit intégrer des objectifs clairs et ambitieux en matière de modernisation des lignes existantes, d’électrification des réseaux et de développement du fret ferroviaire.
En outre, l’État doit garantir un financement stable et suffisant sur le long terme, à l’image de l’Allemagne qui investit massivement dans ses infrastructures ferroviaires. Puissent les parlementaires, si prompts à signaler des cas particuliers, faire front commun pour exiger de l’État qu’il joue et assume son rôle stratège, en exigeant aussi une loi de programmation ferroviaire. Ce faisant, les collectivités locales et les Régions bouclent les plans de financement, hors compétences premières.
« Notre demande est simple : que l’État assume pleinement son rôle de propriétaire du réseau ferroviaire »
Les Régions paient déjà chaque année des péages ferroviaires prévus pourtant à cet effet, en Nouvelle-Aquitaine de l’ordre de 80 millions d’euros par an. Les Régions ont démontré que leur compétence ferroviaire avait permis de multiplier l’offre sur tous les territoires périurbains ou ruraux, partout où le réseau pouvait le supporter. Nous assumons pleinement notre rôle d’Autorité organisatrice de la mobilité [AOM], en finançant l’achat de rames, les guichets de vente de billets, 76 % du prix réel des billets achetés, et bien entendu les cheminots qui conduisent les trains ou les contrôleurs, tout cela avec comme seule ressource la vente des billets de train !
À ce stade, notre demande est simple : que l’État assume pleinement son rôle de propriétaire du réseau ferroviaire et qu’il nous laisse assumer le nôtre en continuant à augmenter l’offre de trains. Ainsi, le contrat de performance entre l’État et SNCF Réseau est bien plus qu’un simple document administratif ; c’est le socle sur lequel reposera l’avenir du réseau ferroviaire français pour les décennies à venir, un modèle d’ambition, de responsabilité et de vision à long terme. Moins que jamais, la France ne doit pas manquer son rendez-vous avec l’Histoire en train de se faire.