3 décembre 2023 - Gilles Savary
La Société de projet GPSO : un cheval de Troie institutionnel pour piéger les finances locales dans le financement des TGV.
On distingue schématiquement trois générations distinctes de financement des LGV en France :
- Des années 80 à la LGV Paris Strasbourg ( 1 ère Phase) : un financement intégral par l’Etat et
la SNCF de l’investissement dans l’infrastructure ferroviaire, les collectivités locales
n’intervenant que dans le financement des infrastructures annexes de leurs domaines de
compétences respectifs : accès aux gares , voiries , parkings ....
- A compter de la LGV Paris- Strasbourg en 2007 jusqu’aux lignes Sud Europe Atlantique et
Bretagne Pays de Loire (2016) un financement de l’investissement d’infrastructure
ferroviaire partagé entre l’Etat , Réseau Ferré de France et les Collectivités riveraines ,
Régions, Départements , CDC et grandes communes contiguës aux lignes , avec notamment
des montages contractuels de type Concession ( Sud Europe Atlantique ) ou Partenariat
Public Privé ( Ligne nouvelle Bretagne pays de Loire ) impliquant principalement des
financements et une maitrise d’ouvrage privés .
- Les nouvelles LGV « Castex » GPSO Bordeaux-Toulouse-Dax , LNMP Nîmes – Perpignan et
la ligne nouvelle LNPCA Marseille-Nice ( non LGV) à compter de 2021 , sont financées à
parité par l’Etat et les Collectivités locales , les financements de ces dernières étant
débudgétisées à travers des Sociétés de Projet créées par voie réglementaire pour 40 ans.
Ces Sociétés de Projet se financeront par emprunts groupés levés sur les marchés financiers,
remboursables par les recettes d’une fiscalité locale dédiée, présentée comme ayant été
demandée par les Collectivités Territoriales.
1 Un montage financier opportuniste et confus en totale rupture de doctrine fiscale et de
répartition des compétences publiques .
Afin , à la fois , de débudgétiser autant que possible les concours publics au financement des
3 lignes nouvelles décidées par le Gouvernement Castex , d’inscrire la participation
financière des Collectivités locales dans la durée de l’ouvrage et de ses aléas et non plus par
fonds de concours ponctuels, et de mobiliser une fiscalité locale la plus furtive que possible ,
les fonds propres des Sociétés de Projet instituées pour chacun des 3 ouvrages , seront
dotées de trois taxes locales , vouées à assoir et rembourser leurs emprunts sur les marchés
financiers :
Une nouvelle taxe spéciale d’équipement prélevée sur les ménages résidents à une
heure ou moins de voiture d’une future gare TGV de la ligne ( art 1609 H du CGI) .
Instaurée par amendement gouvernemental ( 21 décembre 2021) à la loi de finances
2022 , plafonnée à 24 millions d’euros et à prise d’effet à compter du 1 er Janvier
2023 . Cette taxe a déjà été réévaluée à 29,5 millions d’euros par le Senat et indexée
sur l’inflation par amendement à la loi de finances 2023( Raynal) . Le calcul du temps
de trajet déterminant de la fiscalisation est bien évidemment parfaitement arbitraire
en fonction des conditions de trafic et d’accessibilité des gares TGV , notamment à
l’heure de pointe pour ce qui concerne les gares centrales des principales
agglomérations.
2
o Un amendement sénatorial (Raynal) daté du 21 novembre 2022 a par ailleurs
instauré un « centime additionnel » de + 34% aux taxes de séjour perçues dans les
3 Régions concernées : à compter de 2023 dans les 3 départements du Var, des
Alpes-Maritimes et des Bouches du Rhône et à compter de 2014 dans les
Départements de la Gironde, du Lot et Garonne , des Landes , des Pyrénées
Atlantiques , du Tarn et Garonne, de la Haute Garonne, de l’Ariège du Gers , du Lot
et du Tarn pour GPSO ; de l’Hérault, de l’Aude et des Pyrénées Orientales pou LNMP .
Ainsi des départements qui ont pour ressource essentielle le tourisme, comme
l’Ariège, le Lot et de très nombreuses communes rurales enclavées qui s’efforcent de
développer le tourisme intérieur sont surtaxées alors que la plupart de leurs
établissements ne sont pas accessibles par chemin de fer ..
o Une taxe spéciale d’équipement complémentaire, instaurée par le même
amendement Raynal en PLF 2023 , acquittable dans les communes concernées par
la première instaurée en LF 2022, recouvrée sur l’immobilier de bureaux, les locaux
commerciaux, les surfaces de stationnement et les espaces de stockage .
Ainsi , à titre d’exemple , les deux taxes d’équipement sur les ménages et sur les
activités économiques prélevées pour financer la LGV GPSO dans les villages et
bourgs ruraux du Sud de la Charente Maritime ou du centre des Landes ne
concerneront pas les résidents et entreprises de La Rochelle , Saintes ou Royan , ni
ceux de Mimizan et Biscarosse ( mais ceux de Sanguinet sur le même lac !) , dans
les mêmes départements ( art 1609 H du CGI introduit en PLF 2022) ! De façon
générale ces taxes frapperont très largement les petits villages et bourgs ruraux qui
s’efforcent de développer le tourisme intérieur et de conserver les rares commerces
et entreprises artisanales qui y sont implantées , notamment en Ariége, dans le Tarn
, le Tarn et Garonne , le Lot et Garonne, le Gers , l’Aude , la Haute Lande , le sud
Charente et le sud Saintonge . En revanche les très courues Ile de Ré et presqu’ile du
Cap Ferret en sont préservées ..
Des communes rurales aujourd’hui desservies par le TGV en gare de Libourne ,
comme Abzac, Pomerol, Saint Médard de Guizieres , Saint Seurin sur l’Isle et
l’ensemble du libournais , sont mises à contribution pour financer Bordeaux-
Toulouse-Dax ...
La mise en place de ces taxations locales pour financer un service commercial de trains lourds
s’inscrit dans une tendance lourde à un très net désengagement relatif des financements nationaux
(Etat et SNCF), au gré des générations successives de LGV . ( Cf Crozet TIM n° 532 Mars Avril 2022 )
2 Un plan de financement « faux frère » du modèle économique du Grand Paris Express.
Ce nouveau mode de financement des LGV du sud de la France a été présenté par le Gouvernement
comme une transposition aux nouvelles LGV, du modèle de financement, particulièrement efficient,
du chantier géant de 200 km de lignes de métro du Grand Paris Express dans l’agglomération
parisienne.
La Société du Grand Paris ( SGP) regroupe l’Etat, la Région Ile de France, la Métropole parisienne et
les Départements traversés par le chantier.
En tant que Maitre d’ouvrage du Grand Paris express , la loi l’autorise à lever un impôt sur
l’immobilier de bureau , très lucratif en Région parisienne, ainsi qu’une taxe additionnelle à la taxe
d’équipement pour un rendement estimé à 800 millions d’euros en régime de croisière( actuellement
600 millions d’euros) lui permettant de souscrire des emprunts sur les marchés financiers,
remboursables à terme par les recettes fiscales et celles de l’infrastructure ( péages).
3
Ce modèle de financement, débudgétisé et institutionnalisé sur la durée de réalisation et
d’amortissement de l’ouvrage au moins, présente l’inestimable mérite de soustraire l’accès à son
financement des aléas politiques tenant à l’annualité des budgets publics et à d’éventuelles
alternances politiques , et de conférer ainsi au maitre de l’ouvrage une totale maitrise de ses rythmes
de chantier et de financement.
Pour autant l’endettement de la SGP est maastrichtien et entre dans les critères du Pacte de stabilité
européen.
Il est soumis aux variations des taux d’intérêts sur le marché financier (actuellement à la hausse pour
lutter contre l’inflation) et la fiscalité qui lui est dédiée en constitue la variable d’ajustement.
Cependant le parallèle effectué par le Gouvernement Castex entre la Société du Grand Paris, et les
Société de Projet de la SGP est particulièrement cavalier, de deux point de vue au moins :
- La Société du Grand Paris est maitre d’ouvrage de l’infrastructure : elle réalise les travaux,
maitrise ses appels d’offres, contrôle ses coûts, ses fournisseurs, et son calendrier de travaux,
alors que les travaux des LGV du Sud de la France seront réalisés par SNCF Réseau et pour
son compte.
Les Sociétés de Projet LGV ne sont que des sociétés de cantonnement de la dette des
Collectivités locales. Elles empruntent et lèvent l’impôt nécessaire au remboursement de
leur dette, en dehors de tout contrôle direct de leurs assemblées. Déjà une réévaluation de
la taxe spéciale d’équipement et des surtaxes de taxes de séjour ont été votées à l’initiative
d’un amendement sénatorial socialiste (« téléphoné »par le Gouvernement ) à la loi de
finances 2023 , sans que les Collectivités locales concernées aient été formellement
consultées. Mieux encore la taxe spéciale d’équipement prélevée pour la ligne Nouvelle
Marseille Nice est indexée sur l’inflation, au mépris de la souveraineté fiscale du Parlement!
Elles subiront, faute d’expertise technique et sans la moindre marge de manœuvre, la
conduite et le rythme des travaux réalisés par SNCF Réseau. Elles seront immanquablement
invitées à financer d’éventuels dépassements financiers au prorata des clefs de financement
du protocole financier conclu avec l’Etat ainsi que les variations des taux d’intérêt du marché
financier, et par conséquent à souscrire des suppléments d’emprunts au fil du temps,
remboursables par des hausses de la fiscalité qui leur est dédiée.
- Le modèle de la SGP revient à prélever une fiscalité locale ( majoritairement sur
l’immobilier) sur les franciliens à usage d’un nouveau service public de transport local pour
les franciliens, alors que la Société de Projet de GPSO prélève une fiscalité sur les ménages
locaux et entreprises locales d’une très vaste zone géographique pour une infrastructure et
des services commerciaux haut de gamme à vocation nationale et internationale dont une
très faible part des populations fiscalisées seront des usagers réguliers . Les franciliens sont
fiscalisés pour un service public de proximité quand les aquitains et les occitans acquittent
une fiscalité locale dédiée à un service commercial national et international grande
distance qui n’apporte aucune solution significative à leur déficit de transports publics de
proximité.
Il faut à cet égard distinguer le projets GPSO de LGV à la française destinées à supporter des
trafics exclusivement voyageurs à 320 km/h , de la Ligne Nouvelle Provence Cote d’Azur qui
consistera essentiellement à créer une ligne nouvelle classique alternant des sections
existantes et des sections et équipements nouveaux ( notamment de gares ) visant à
accueillir tous les trafics , et en particulier à remédier à la qualité déplorable des services de
4
TER et d’inter cités actuels sur l’axe à haute fréquentation Aix-Marseille - Toulon et Nice . Des
trois lancés en 2021 , ce projet qui revient à créer une ligne partiellement nouvelle, à usage
principalement local, peut justifier une transposition du modèle de fiscalisation locale de la
SGP.
La grande nouveauté des sociétés de projet LGV par rapport aux fonds de concours est
d’institutionnaliser et de verrouiller dans la durée les collectivités locales dans le financement
d’infrastructures à vocations nationale et internationale pour y opérer des services TGV au modèle
économique à rendements décroissants, qui pourraient de proche en proche les solliciter à terme
pour la maintenance des lignes..
Pour les ménages aquitains et occitans fiscalisés, ces impôts locaux détournés pour le financement
de LGV constituent une entorse caractérisée aux principes de nécessité, d’égalité, et de destination
locale des taxes locales, qui doivent justifier toute création d’impôt.
3 Une rupture d’égalité fiscale caractérisée.
Depuis les années 80 l’Etat ( et la SNCF) qui ont intégralement financé la première génération de LGV
,n’ont cessé de solliciter une part croissante de participation financière des Collectivités locales
situées sur les trajets des générations suivantes de LGV . Les responsables politique locaux n’y ont
que rarement opposé une fin de non recevoir à l’instar de Henri Emmanuelli président du Conseil
Général des Landes , ou de Ségoléne Royal présidente de la Région Poitou- Charentes qui ont refusé,
lors du tour de table de la LGV Tours-Bordeaux à l’époque, d’engager leurs Collectivités dans le
financement d’un investissement national qu’ils jugeaient hors compétence ,
Mais jusqu'à présent, les participations financières des Collectivités locales se traduisaient par des
fonds de concours, votés par leurs assemblées en toute transparence , acquittables une fois pour
toutes, et n’impliquant pas les Collectivités locales et les contribuables locaux dans les aléas
ultérieurs du projet .
Pour les trois premiers projets de la génération Castex, et en particulier pour GPSO au coût
kilométrique phénoménal - 34 millions d’euros du kilomètre pour GPSO pour un gain d’une heure
maximum sur un Toulouse- Paris direct ( fortement concurrencé par l’avion quand les extensions
des métros de Toulouse et de Paris desserviront les aéroports d’Orly et de Blagnac) et de 25000
voyageurs /jour dans l’ensemble de la zone ferroviaire du projet ( cf COI 2023) )- le montage retenu
est doublement novateur :
- Les Collectivités Locales contributives sont regroupées pour 40 ans dans un établissement
public financier, chargé de souscrire leur part de financements sur les marchés financiers au
taux du marché. A la différence de la SGP, cette structure, dotée de trois taxes, n’aura pas la
compétence de maitre d’ouvrage du chantier, dont les travaux seront réalisés sous la
maitrise d’ouvrage de SNCF réseau. Il s’agit donc essentiellement d’un outil de
débudgétisation et de mutualisation de la contribution des collectivités locales, qui
échappera à tout contrôle direct des assemblées locales
- Les ménages résidant à une heure et moins ( critère linéaire « irréel » et arbitraire , dénué
de toute considération de trafic ) d’une future gare TGV devront acquitter une surtaxe à la
taxe spéciale d’équipement dédiée à la société de projet de la LGV , pendant les 40 années
de son existence . Par ailleurs les entreprises privées et les commerces propriétaires d’actifs
immobiliers ainsi que les réceptifs de tourisme ( Hotels, Gites ruraux, campings )
acquitteront des taxes locales supplémentaires discriminatoires par rapport à leurs
concurrentes situées hors des zonages arbitraires de fiscalisation arrêtés par le Parlement .
5
Ce montage, qui présente toutes les apparences de celui mis en place avec succès pour la réalisation
du Grand Paris Express , s’en distingue par des réalités qui ne sont pas anecdotiques.
- Rien ne justifie que seuls des contribuables locaux soient taxés pour une LGV à vocation
explicitement internationale, dont la diminution des temps de parcours constituera un
bénéfice pour l’ensemble de sa clientèle professionnelle et touristique , ibérique, occitane et
aquitaine , mais aussi nationale et parisienne. L’argument selon lequel la taxation des
populations de l’Ariége , du Lot ou de la Cote basque se justifie par le gain de temps d’accés
que la future LGV leur procurera pour se rendre à Paris , est parfaitement réversible pour les
populations franciliennes , mais aussi du Centre de la France , voire du Nord ou de
Normandie , pour se rendre sur les plages landaises et basques, au festival de Marciac , dans
leurs résidences secondaires du lot , ou dans les stations pyrénéennes de l’Ariège . Et si l’on
peut convenir que les segments de LGV construits à l’accès sud de Bordeaux ( AFSB) et à
l’accès nord de Toulouse ( AFNT) seront de nature à libérer d’actuels bouchons ferroviaires ,
l’option de lignes nouvelles de véritables RER métropolitains aux accés d’agglomération ,
couplées à une modernisation de Bordeaux-Toulouse , serait infiniment moins couteuse ,
socialement plus utile , et plus durablement protectrice de conflits de trafics pour les trafics
du quotidien si le ferroviaire connait les développements qu’on lui promet.
- Ce prélèvement fiscal pour 40 ans aura un effet durable d’éviction de ressources publiques
locales aux dépens du développement, pourtant impérieux , de solutions de transport publics
de proximité qui manquent précisément aux populations périurbaines et rurales qui vont
être fiscalisés pour ces LGV .
- Il embarque les Collectivités locales « volontaires » dans un financement des LGV ,
institutionnalisé pour la durée d’amortissement de l’exploitation , avec une forte probabilité
qu’elles soient solidairement contraintes de financer les aléas et dépassements budgétaire
de la construction , si ce n’est , à terme la maintenance d’une infrastructure vouée à un
déficit d’exploitation .*
- Enfin , il ne tire aucun avantage de la valeur ajoutée qu’a indéniablement apportée la
maitrise d’ouvrage de SGP à la réalisation du métro grand Paris express : gouvernance
financière politique et technique intégrée , notation financiere premium, développement
d’une ingénierie complexe et dédiée , maitrise et transparence des coûts , conduite fluide et
optimale de toutes les dimensions de la maitrise d’œuvre ( maitrise foncière, programmation
des travaux , maitrise des marchés publics et des sous-traitances , traitement des impacts
environnementaux.). Rien de tout cela ne sera piloté et maitrisé par les Sociétés de Projets
Castex , et encore moins contrôlé par les assemblées politiques locales ..
Au total ce montage institutionnel est des plus discutables, à la fois :
- par la destination dévoyée, contraire toute orthodoxie fiscale , et le manque de
transparence confondant des taxations et surtaxations qui lui sont dédiées, conçues
habituellement pour contribuer au financement de réseaux de dessertes et d’équipements
locaux comme le tout à l’égout, la fibre, la voirie, le stationnement etc..
- par la confusion totale de compétences qu’il introduit en matière de financement des
services ferroviaires en banalisant un transfert de charges croissant et désormais
institutionnalisé de l’Etat sur les Collectivités et populations locales au bénéfice d’un type de
service ferroviaire commercial , totalement étranger à leurs compétences, et à l’essentiel de
leurs besoins de mobilité locale.
6
- par l’effet d’éviction financière qu’il induit au profit d’un grand équipement de desserte
national et européen, hors compétence des collectivités locales, aux dépens des transports
publics locaux qui leur incombent de plein exercice. En particulier, ce montage fiscal qui
ponctionne les ménages et les entreprises, privera les grandes Collectivités des Régions
concernées, et elles seules, de la marge de manœuvre fiscale leur permettant de recourir à
des montages identiques à celui du Grand Paris express pour la réalisation de grands projets
d’infrastructures locaux de type lignes de métro, rocades urbaines ou « RER
métropolitain »...Ce qui sera encore possible à Rennes , Strasbourg ou Nantes ne le sera plus
à la même échelle à Toulouse , Bordeaux ou Montpellier du fait de la préemption de
ressources fiscales locales par le financement des LGV.
- par l’injustice et les distorsions fiscales qu’il introduit pour plusieurs décennies, entre les
populations et entreprises des Régions de France concernées par cette génération de LGV ,
et celles des autres Régions déjà équipées de lignes LGV .
Il instaure une rupture d’égalité fiscale caractérisée , entre les populations et entreprises
locales des Régions concernées , fiscalisées pour financer cette génération de LGV, et les
autres populations et entreprises de notre pays qui bénéficieront indistinctement et aux
mêmes tarifs des futurs services de ces lignes nouvelles , à commencer par les franciliens,
grands utilisateurs des TGV. A titre d’exemple , les ménages de Jonzac et des communes
environnantes, ou encore ceux du sud médoc ou du libournais acquittent la fiscalité GPSO ,
mais pas les résidents et entreprises de l’ile de Ré ou du Cap ferret ...
Pour Conclure : une transposition inappropriée, fallacieuse, juridiquement contestable et
politiquement impopulaire du modèle du Grand Paris Express.
Indépendamment de toute considération d’opportunité de développer des infrastructures aussi
couteuses et contraires à nos priorités politiques affichées de « zéro artificialisation nette » ou de
sauvegarde des zones de biodiversité remarquable ( le Ciron en Gironde) , le montage retenu et mis
en œuvre à une vitesse législative inhabituelle, est profondément choquant et contestable à
plusieurs égards :
Il disqualifie un peu plus la DUP de GPSO adoptée en 2016 « d’autorité » contre l’avis du
Commissaire enquêteur et 93% des répondants à l’enquête publique , qui n’évoquait à aucun
moment un mode de financement qui fiscalise aujourd’hui inégalement les populations et les
acteurs économiques locaux , et suscite des manifestations légitimes de surprise et d’indignation des
municipalités concernées.
Il s’est distingué par une sous information notoire et caractérisée des élus locaux et des populations
locales concernées sur les tenants et les aboutissants de l’implication financière des collectivités et
des populations locales . En particulier les taxations locales, mises en place sur un mode furtif dans
un climat de complicités politiques improbables , n’ont pas fait l’objet de la moindre information ni
débat publics préalables au fait accompli de leur mise en œuvre .
Il constitue le cheval de Troie le plus sophistiqué et sans doute l’un des plus arbitraires et injustes,
de transferts de charges substantiels et à effet de cliquet durable de compétences de l’Etat sur les
Collectivités locales. Si ce montage devait faire école et se banaliser , il constituerait de fait , un
puissant vecteur de confusion , d’injustice territorial et de désordre institutionnel et fiscal.
7
Il est de nature à fragiliser l’adhésion politique des élus locaux et des populations fiscalisées aux
projets qu’il porte, ainsi qu’on l’a noté quand les élus locaux de Nouvelle Aquitaine ont pris
connaissance des contributions fiscales qui étaient infligées à leurs populations, sans la moindre
information préalable.
Il est particulièrement fragile et contestable juridiquement pour ce qui concerne GPSO :
- en regard de la DUP sur lequel il repose que l’on peut à bon droit considérer, au mieux
comme incomplète , au pire comme une tromperie manifeste des populations consultées .
- en regard de la nature et de la destination de la fiscalité discriminatoire qui lui est dédiée et
des ruptures d’égalité qu’elle introduit dans le temps et dans l’espace entre contribuables pour
financer un projet hors compétences des collectivités locales.
- en regard de prélèvements de thésaurisation fiscale , encore très éloignées de tout
commencement de travaux , dans le cadre d’un plan de financement non stabilisé au plan européen(
20% attendus) , qui ont débuté dés l’exercice 2022 .
Pour autant, il ne disqualifie pas l’intérêt et la légitimité de la transposition de montages
institutionnels de type SGP à d’autre grands projets que le Grand Paris Express, pourvu qu’ils
soient conformes au modèle originel de la SGP :
- Des Sociétés de Projet constituées de Collectivités publiques légitimes à financer par
destination des projets de leurs niveaux de compétences : nationales pour des projets
nationaux, locales pour des projets locaux.
- Le recours à une ressource fiscale transparente et du niveau du projet concerné : nationale
pour des projets à vocation nationale ou internationale, locale pour des projets à vocation
locale.
- Une maitrise d’ouvrage pleine et entière entrainant des droits de propriété sur l’objet de
l’ouvrage et les recettes d’exploitation affairantes .
A cet égard, des 3 projets de lignes nouvelles « Castex » , le montage en Société de cantonnement de
la dette des Collectivités locales , pour cavalière que soit sa comparaison à la SGP , est
incomparablement plus légitime pour le projet de LNPCA , dont la réalisation constituera une valeur
ajoutée considérable pour les déplacements quotidiens des populations locales entre Aix-Marseille,
Toulon et Nice que pour le projet GPSO.
Ce dernier revient ni plus ni moins à détourner plus de 5 milliards d’euros de financements locaux
de projets locaux plus urgents et plus appropriés , dans le domaine des transports du quotidien très
carentiel en périphéries urbaines notamment , mais aussi aux dépens d’autres besoins d’intérêt
public incontestable comme, par exemple, l’achat d’une flotte régionale d’hélicoptères porteurs
d’eau consécutivement aux incendies de l’été 2022, ou tout autre ....
Le 8 Février 2023
Gilles SAVARY
Consultant.
Ancien Député de la 9 eme circonscription de la Gironde
Ancien Vice- Président du Conseil Régional d’Aquitaine et du Conseil Général de la Gironde
Marc Ivaldi
Directeur d’études à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales
8
Chercheur à la Toulouse School of Economics