26 octobre 2023 - Actu.fr
Considérant que "le plan de financement est loin d'être bouclé", le maire de Bérat (Haute-Garonne) appelle à revoir d'urgence la LGV Bordeaux-Toulouse, un "projet des années 90".
Président de la Communauté de communes Cœur de Garonne et membre du comité de pilotage de la LGV Bordeaux-Toulouse, le maire de Bérat (Haute-Garonne) assure que « le plan de financement est loin d’être bouclé ».(©Simon Vermot Desroches / Actu Toulouse)
Musicien, chanteur et écrivain,Paul-Marie Blancest aussi… maire deBérat(Haute-Garonne), ville de 3 000 habitants située au sud deToulouse, et président de la communauté de communesCœur de Garonne, qui est accessoirement le fief d’une certaine Carole Delga, présidente de la Région Occitanie.
Membre ducomité de suividu Grand projet ferroviaire du sud-ouest (GPSO), cet élu (Génération.s, ex-PS) est l’un des rares maires, et à ce jourle seul président d’intercommunalitéde tout le département, à faire ouvertement part de ses réticences sur le projet deLGV Bordeaux-Toulouse.Un chantier réclamé par la plupart des acteurs économiques et politiques de la quatrième ville de France qui doit, rappelons-le, mettre le Capitole à 3h10 de la capitale, contre 4h20 aujourd’hui.
« La plus grande gabegie financière de ce début de siècle »
Paul-Marie Blanc, lui, n’y va pas par quatre chemins : à ses yeux, le projet de LGV entre Toulouse et Bordeaux « représente peut-êtrela plus grande gabegie financièrede ce début de siècle en France en matière de dépense d’argent public ».
Le GPSO, qui consiste à construire une nouvelle ligne ferroviaire entre Toulouse et Bordeaux, a été estimé à 14 milliards avant la hausse des coûts des énergies. Les travaux ne pourront pas débuter avant 2026/2027 et la facture sera sans doute plus proche des 20 milliards dans la période inflationniste actuelle.
Paul-Marie BlancMaire de Bérat, président de la communauté de communes Cœur de Garonne
« Le plan de financement est loin d’être bouclé »
Siégeant aucomité départemental de suividu GPSO en Haute-Garonne (au même titre que tous les représentants d’intercommunalités situées à une heure de la gare Matabiau, NDLR), Paul-Marie Blanc assure que les doutes gagnent de plus en plus d’élus, car dit-il, « il apparaît quele plan de financementest loin d’être bouclé ».
Le financement doit se répartir entre l’État (40%), les collectivités locales (40%) et l’Europe (20%). Or, les aides européennes restent à ce jour conditionnées à une liaison transfrontalière vers l’Espagne depuis Dax, laquelle est pour l’instant abandonnée.
Paul-Marie Blanc
La participation de l’Europe « n’est pas assurée »
Les crédits européens sont, d’après lui, loin d’être acquis, faute de caractère international du projet : « Il nous a été dit qu’aujourd’hui, la participation de l’Europe n’était pas assurée, si ce n’est quelques millions (très précisément,59,7 millions ont été annoncésen juin, NDLR), mais on est loin des 20 % annoncés… Si la facture grimpe à 20 milliards, il y a doncquatre milliards à trouver(soit davantage que le coût total de la 3eligne de métro, NDLR). Si l’Europe n’assure pas ce financement, ce sont l’État, les collectivités locales et les contribuables, qui vont en hériter ».
« La double peine » de la taxe LGV
Alors que les contribuables ont justement vu apparaître pour la première fois la fameuse taxe LGV sur leurs avis d’impôt cet automne, ce maire estime que la plupart d’entre eux n’entireront aucun bénéfice.
Pour financer la LGV,tous les propriétaires situés à moins d’une heure de l’une des gares du projetsont en effet assujettis à une nouvelleTaxe spéciale d’équipement(TSE), mais Paul-Marie Blanc s’étonne que dans le même temps, « rien n’est prévu pour leurs trajets domicile-travail. N’y a-t-il pas là une contradiction, pour ne pas dire une aberration ? »
Musicien, chanteur et écrivain,Paul-Marie Blancest aussi… maire deBérat(Haute-Garonne), ville de 3 000 habitants située au sud deToulouse, et président de la communauté de communesCœur de Garonne, qui est accessoirement le fief d’une certaine Carole Delga, présidente de la Région Occitanie.
Membre ducomité de suividu Grand projet ferroviaire du sud-ouest (GPSO), cet élu (Génération.s, ex-PS) est l’un des rares maires, et à ce jourle seul président d’intercommunalitéde tout le département, à faire ouvertement part de ses réticences sur le projet deLGV Bordeaux-Toulouse.Un chantier réclamé par la plupart des acteurs économiques et politiques de la quatrième ville de France qui doit, rappelons-le, mettre le Capitole à 3h10 de la capitale, contre 4h20 aujourd’hui.
« La plus grande gabegie financière de ce début de siècle »
Paul-Marie Blanc, lui, n’y va pas par quatre chemins : à ses yeux, le projet de LGV entre Toulouse et Bordeaux « représente peut-êtrela plus grande gabegie financièrede ce début de siècle en France en matière de dépense d’argent public ».
Le GPSO, qui consiste à construire une nouvelle ligne ferroviaire entre Toulouse et Bordeaux, a été estimé à 14 milliards avant la hausse des coûts des énergies. Les travaux ne pourront pas débuter avant 2026/2027 et la facture sera sans doute plus proche des 20 milliards dans la période inflationniste actuelle.
Paul-Marie BlancMaire de Bérat, président de la communauté de communes Cœur de Garonne
« Le plan de financement est loin d’être bouclé »
Siégeant aucomité départemental de suividu GPSO en Haute-Garonne (au même titre que tous les représentants d’intercommunalités situées à une heure de la gare Matabiau, NDLR), Paul-Marie Blanc assure que les doutes gagnent de plus en plus d’élus, car dit-il, « il apparaît quele plan de financementest loin d’être bouclé ».
Le financement doit se répartir entre l’État (40%), les collectivités locales (40%) et l’Europe (20%). Or, les aides européennes restent à ce jour conditionnées à une liaison transfrontalière vers l’Espagne depuis Dax, laquelle est pour l’instant abandonnée.
Paul-Marie Blanc
La participation de l’Europe « n’est pas assurée »
Les crédits européens sont, d’après lui, loin d’être acquis, faute de caractère international du projet : « Il nous a été dit qu’aujourd’hui, la participation de l’Europe n’était pas assurée, si ce n’est quelques millions (très précisément,59,7 millions ont été annoncésen juin, NDLR), mais on est loin des 20 % annoncés… Si la facture grimpe à 20 milliards, il y a doncquatre milliards à trouver(soit davantage que le coût total de la 3eligne de métro, NDLR). Si l’Europe n’assure pas ce financement, ce sont l’État, les collectivités locales et les contribuables, qui vont en hériter ».
« La double peine » de la taxe LGV
Alors que les contribuables ont justement vu apparaître pour la première fois la fameuse taxe LGV sur leurs avis d’impôt cet automne, ce maire estime que la plupart d’entre eux n’entireront aucun bénéfice.
Pour financer la LGV,tous les propriétaires situés à moins d’une heure de l’une des gares du projetsont en effet assujettis à une nouvelleTaxe spéciale d’équipement(TSE), mais Paul-Marie Blanc s’étonne que dans le même temps, « rien n’est prévu pour leurs trajets domicile-travail. N’y a-t-il pas là une contradiction, pour ne pas dire une aberration ? »
Président de la Communauté de communes Cœur de Garonne, Paul-Marie Blanc est maire de Bérat.(©DR)
« Pour ceux coincés dans les bouchons, que fait-on ? »
« Sur mon territoire, de nombreux salariés travaillent dans l’agglomération toulousaine et leurs temps de trajets pour se rendre sur leur lieu de travail ne cessent d’augmenter. Les coûts de transport également », poursuit le maire de Bérat. « Ce constat est valable pour toute la périphérie toulousaine ».
Pour les centaines de milliers de personnes coincées dans les bouchons autour de Toulouse, que fait-on ? J'aimerais qu'on m'invite à un comité de suivi des trains du quotidien dans l'agglo, mais cela n'existe pas. Rien, strictement rien n'a été annoncé pour ces transports du quotidien !
Paul-Marie Blanc
La taxe LGV va-t-elle flamber ?
Pire, il craint que cette taxe, présentée jusqu’ici comme une simple variable d’ajustement, neflambe rapidement. « Quand les contribuables ontvu cette nouvelle taxe arriver sur leur impôt foncier, on leur a dit : ne vous inquiétez pas, ce n’est quelques euros (souvent, autour d’une dizaine d’euros, NDLR), mais s’il manque 4 milliards, ils vont vite la sentir passer… »
La crainte de « conséquences désastreuses »
En fin de compte, l’élu redoute plus que jamais les « conséquences désastreuses de cette ligne sur nos territoires et sur les budgets de nos collectivités. Sans parler de l’effort réclamé à nos contribuables, pour construire cette ligne, on a demandé à notre intercommunalité70 000 euros par an, pendant 40 ans ».Et de soupirer : « Après un débat en interne, Cœur de Garonne a refusé de donner suite. Cet argent-là, dans nos territoires ruraux, on en a besoin pour financer d’autres équipements… ».
Un projet « des années 90 » ?
L’édile pointe aussi l’impact environnemental du projet : « Le GPSO a reçu unavis défavorablede l’enquête publique initiale et l’étude d’impact environnementale est accablante ». Il rappelle les mises en garde de l’Autorité environnementale qui a dépeintun « dossier extraordinairement pauvre »,ainsi que « des associations reconnues d’intérêt général associées au projet ».
Reprenant un argumentaire proche de celui desopposants à l’autoroute Castres – Toulouse, ce maire considère quece projet « des années 90 »est révolu, et « ne correspond plus au contexte actuel ».
Il apparaît de plus en plus évident que ce chantier imaginé dans les années 90 est devenu totalement anachronique et constitue un non-sens, tant sur le plan économique qu’environnemental.
Paul-Marie Blanc
« On ne va plus à Paris pour un jour »
Dans la plus grande métropole de France non desservie par le TGV, et alors que la navette aérienne entre Toulouse et Paris reste la première ligne d’Europe, quelle alternative propose cet élu pour rallier facilement dans la capitale ? « On n’a plus les mêmes besoins de déplacement qu’avant le Covid », avance déjà Paul-Marie Blanc.
Ceux qui font Toulouse-Paris en avion pour des déplacements du quotidien, il y en a de moins en moins. Même chez les élus, à l'AMF par exemple, on utilise constamment la visioconférence désormais. Le Covid a entraîné un changement de comportements, et on ne reviendra pas en arrière.
Paul-Marie Blanc
« La démocratisation dutélétravailet de lavisioconférencepost-Covid devrait nous conduire à revoir nos besoins de déplacements », étaye Paul-Marie Blanc. Rappelant qu’Air France « vient d’annoncer une baisse de 60% des allers-retours Toulouse-Paris entre 2019 et 2023 », il soulève : « On ne va plus à Paris pour un jour.
La présidente de la région « s’entête »
L’élu déplore enfin le soutien inconditionnel de Carole Delga — dont il collait jadis les affiches, mais avec qui il admet être aujourd’hui que « les liens sont distendus » — à ce projet.
La présidente de la région Occitanie s’entête en considérant que le développement de Toulouse passe coûte que coûte par l’arrivée du TGV. C'est un argument très discutable quand on sait que la ville et sa région connaissent déjà une des plus fortes expansions en Europe. Et la Métropole continuera de s'accroître même sans la LGV.
Paul-Marie Blanc
S’il est un des rares maires (aveccelui de L’Union, Marc Péré)à s’opposer ouvertement au projet, c’est parce que« beaucoup d’élus n’osent pas aller contredire Carole Delga »,suppute Paul-Marie Blanc, « mais je peux vous dire que beaucoup pensent comme moi. Même sur sa propre intercommunalité, je suis loin d’être le seul à ne pas être chaud pour financer ce truc-là… »
Une alternative « un peu vite écartée » ?
Le maire de Bérat estime pourtant qu’une « une solution alternative existe » à ce projet, mais qu’elle a été « un peu vite écartée ».
La rénovation de la ligne ferroviaire actuelle permettrait de réduire de moitié la dépense, tout en gagnant 40 minutes au lieu d’une heure entre Toulouse et Bordeaux. Elle permettrait d’emmener le TGV jusqu’à Toulouse sans détruire 4 830 hectares d’espaces naturels, et sans défigurer les villages traversés. L’écart entre ces deux alternatives est de 20 mn de temps en plus (30 mn si l'on considère le gain de temps de 1h10, et non 1h, annoncé par les porteurs de projet, NDLR) et 10 milliards de dépenses en moins. De quoi faire réfléchir.
Paul-Marie Blanc
« Le prix à payer au regard du temps économisé paraît indiscutablement disproportionné », avance Paul-Marie Blanc, pour qui ce projet se résume désormais àun « non-sens économique, environnemental et social ».Et l’élu de conclure : « Il n’est peut-être pas trop tard tant que les pelleteuses ne sont pas descendues des camions ».
De leur côté, les porteurs du projet ont confirmé récemment un calendrier resserré : le préfet Pierre-André Durand a indiqué début octobre que l’enquête publique devrait être lancée « dans le courant du mois de novembre ». En juillet dernier, le ministre des Transports Clément Beaune avait assuré queles travaux de la LGV devraient commencer fin 2023.