22 septembre 2023 - Mediabask
La demande de dérogation à la protection des espèces du projet d’aménagements ferroviaires du nord de Toulouse a reçu un avis défavorable de l’institution rattachée au ministère de la Transition écologique, qui pointe des « lacunes rédhibitoires ».
L'avis du CNPN met à mal le projet de ligne à grande vitesse. © Guillaume FAUVEAU
C’est un nouveau caillou dans la chaussure du Grand projet ferroviaire du Sud-Ouest. Déjà affaibli par l’avis critiquede l’Autorité environnementale, le projet d’aménagements ferroviaires du nord de Toulouse (AFNT) est loin de convaincre le Conseil national de la protection de la nature (CNPN).
L’institution, chargée de donner son avis sur les projets sur la préservation des espèces sauvages et des espaces naturels, a émis un avis défavorable à la demande de dérogation à la protection des espèces, le 11 septembre dernier.
Le scénario de report modal ne convainc pas
La demande de dérogation concerne 73 espèces : 37 d’oiseaux, six de mammifères terrestres, 17 de chiroptères, sept de reptiles, trois d’amphibiens, deux d’insectes et une de flore.
Si le CNPN reconnaît que « les motifs [de l’AFNT] sont justifiés » et que son « intérêt public est manifeste », l’argumentaire aurait pu être plus solide, d’après lui : « Il aurait été intéressant d’amener des éléments relatifs à l’ensemble des réseaux des transports. En effet, la plus-value du projet repose largement sur un scénario de report modal conséquent. Or, il semble que de nombreux projets routiers sont en cours dans la région. Le renforcement de ce réseau peut être de nature à soutenir l’usage des véhicules particuliers. »
« Deuxièmement, il aurait paru pertinent de voir apparaître l’intégration des mobilités douces (liaisons train-vélo notamment) dans un projet se présentant sous une logique de mobilité durable. »
« Lacune rédhibitoire »
L’avis du CNPN met en cause le choix de l’emplacement pour le raccordement à la ligne nouvelle. « Si l’argumentaire concernant l’absence de solution alternative est convaincant, il comporte une lacune rédhibitoire, affirme le CNPN. Le choix de la zone de Saint-Jory pour le raccordement à la ligne nouvelle n’est pas justifié et il n’est pas présenté d’alternative. Ce choix n’est pas compréhensible de façon intuitive au regard de profil territorial. On aurait pu imaginer que le raccordement soit réalisé dans une zone plus dégradée, et non sur les quelques espaces encore relativement préservés de la zone. »
« Enjeux mal évalués »
En conclusion, le Conseil national de la protection de la nature juge que « le dossier de demande de dérogation est insuffisant ». Selon lui, deux points de départ « conduisent à invalider l’ensemble du dossier ». Il cite tout d’abord l’absence d’« un volet entier du choix de l’alternative de moindre impact » concernant le raccordement à la ligne nouvelle au niveau de Saint-Jory.
D’autre part, souligne le CNPN, « l’aire d’étude rapprochée est presque resserrée sur l’emprise direct des voies, sans que cette appréhension restreinte du territoire ne soit solidement justifiée. La pression d’inventaire est en outre insuffisante sur un projet de cette ampleur. »
Le CNPN estime que « les enjeux et les mesures sont donc mal évalués sans que des conclusions solides puissent être tirées. Ces éléments étant rédhibitoires pour la bonne application de la doctrine relative à la séquence ERC [évitement, réduction, compensation], le CNPN émet un avis défavorable à cette demande de dérogation ».