4 octobre 2021 - par Serge Alain Paraillous
Les chênes qu'on abat...
Ainsi donc ils vont l'avoir, leur LGV... Ainsi donc les accros à la grande vitesse viennent de gagner. Et une fois de plus, la France d'en haut a eu raison, contre toute raison, de la France d'en bas. Une
fois de plus la France rurale est bafouée, humiliée par des décideurs qui se soucient de l'avis du peuple comme de leur premier tricycle à pédales. Du moment que les Toulousains vont pouvoir
gagner un quart d'heure pour se rendre à Paris, la cause est noble. Ecologie, où es-tu ? A quoi bon pleurer pour un sapin de Noël que l'on coupe, quand bientôt les bulldozers monstrueux vont
éventrer des forêts millénaires. Celle de Lascours, par exemple, entre Vianne et Xaintrailles. Elle est là depuis la nuit des temps. Des druides y ont sans doute coupé le gui. Ses chênes sont plusieurs
fois centenaires : comme les cathédrales, ils sont les témoins de notre passé, de notre histoire, et ils seront tronçonnés comme de vulgaires sapins d'élevage.
Nous n'avons rien contre le train : il existe déjà. La construction de cette voie de chemin de fer, au milieu du XIXè siècle, était une nécessité. Elle a défiguré de nombreux villages et petites villes qui
en portent encore la blessure. Pourquoi faut-il encore défigurer à jamais d'autres paysages ? Car ce n'est pas seulement le tracé qui va balafrer nos vallons et nos collines, mais ce sont les gouffres
qu'il va falloir creuser pour extraire la grave à béton : nos plaines, là où étaient les meilleures terres, celles dont rêvaient jadis les paysans des coteaux, sont déjà de lamentables gruyères
marécageux. La grave et le ciment ne sont ni « durables », ni renouvelables. Ecologie , où es-tu ?
Au XIXè siècle, en même temps que la voie de chemin de fer, les décideurs firent construire le canal latéral à la Garonne, qui fut un échec lamentable et ruineux : parce qu'on s'était trompé
d'époque, et que s'ouvrait précisément l'ère des chemins de fer. Cent cinquante ans après, les décideurs veulent construire la LGV, à l'heure où internet a supplanté en vitesse toutes les autres
voies de communication. Une fois de plus, les décideurs sont entrain de se tromper d'époque. Et toujours à grands frais.
Pas grave, n'est-ce pas , puisque c'est le peuple d'en bas qui paie la facture, celui précisément à qui l'on ne demande.