13 avril 2018 - Sud Ouest
Le Conseil d’État vient de confirmer l’utilité publique des LGV Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax. Les élus du secteur demandent au contraire de prioriser les lignes TER.
L’annonce est tombée mercredi soir. Le Conseil d’État a rejeté tous les recours en annulation contre la déclaration d’utilité publique des lignes LGV Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax. Une annonce de nature à relancer un vieux débat. Sur un air de déjà vu et déjà entendu.
Ce projet est largement décrié en Sud-Gironde où la simple perspective de voir passer des trains qui ne s’arrêtent jamais, n’apporte aucun effet bénéfique.
Précision importante : ce n’est pas le Conseil d’Etat, mais le gouvernement qui décide de la politique ferroviaire.
En attendant un projet de loi
Vu de l’Assemblée Nationale à Paris, où elle se trouvait jeudi, la députée de la 9e circonscription du Sud-Gironde, Sophie Mette, dressait cette analyse : « C’est une épée de Damoclès que nous avons au dessus de nos têtes. Quand on sait que l’État et le gouvernement doivent en priorité débloquer des fonds pour maintenir et améliorer les lignes TER, il faut bien sûr rester vigilant sur ce type d’annonce. Tout se jouera d’ici quelques mois, lors de l’examen du projet de loi de programmation des mobilités. » Pour chercher à contrer le projet de LGV, Sophie Mette ne désespère pas d’obtenir un classement de la vallée du Ciron au patrimoine mondial de l’Unesco.
De son côté, Jean-Luc Gleyze, président du Conseil départemental, est assez bien placé pour se souvenir des premières réunions publiques qui avaient mobilisé jusqu’à 800 personnes hostiles, il y a déjà une dizaine d’années à Captieux, territoire sacrifié par le positionnement d’un triangle ferroviaire à partir duquel se séparent les lignes de Toulouse et Dax :
« Aujourd’hui, le modèle LGV a largement démontré qu’il était déficitaire. La priorité consiste à défendre les lignes de proximité comme Bergerac-Libourne et améliorer le cadencement et les horaires sur les lignes à destination du Verdon, Saint-Mariens et Agen. Sans cela, on accentue la fracture territoriale, la fracture sociale et on attise les votes extrêmes. »
Christian Tamarelle, maire de Saint-Médard-d’Eyrans et président de la Communauté de communes de Montesquieu, attend de savoir si la déclaration suspensive concernant les aménagements ferroviaires au Sud de Bordeaux sera prise en compte avec autant d’attention que la déclaration d’utilité publique de la LGV : « Cela fait trois fois que nous demandons un rendez-vous auprès du ministère des Transports, mais ils ont été ajournés. Nous nous heurtons au lobbying des grands élus. Je veux encore croire aux grandes déclarations en faveur des trains du quotidien. Pour ma part, j’ai l’intention d’adresser un courrier au président de la République pour exprimer mon mécontentement. »
Les « mauvais choix »
La sénatrice Laurence Harribey considère que cette décision pose à la fois un problème sur la forme et sur le fond : « Je m’étonne que la déclaration d’utilité publique ait été prise en dépit d’un avis contraire majoritaire traduit lors des enquêtes publiques. Ensuite, s’il y a une légitimité à relier Paris, Bordeaux, Toulouse, Dax et l’Espagne, le choix arrêté n’est pas le bon. La SNCF n’a pas les moyens d’engager d’énormes travaux et d’autres solutions sont possibles. »
L’ancien député socialiste du Sud-Gironde, Gilles Savary, relève tout de même que « la décision contredit les préconisations de la Cour des comptes pour qui la LGV est un massacre financier. » Opposé au prolongement de la LGV au Sud de Bordeaux, l’ancien élu souligne que l’abandon du réseau classique au profit des grands projets LGV « nous coûte très cher maintenant. Aujourd’hui, il manque 500 millions d’euros chaque année pour entretenir le réseau existant. » Il ajoute que « le TGV concerne 300 000 personnes par jour contre 3,5 millions pour les lignes TER et Intercités. Il est là le service public de proximité. »