09/06/2010 La Dépêche - STÉPHANE BERSAUTER
Face-à-face
Pour des raisons qui relèvent du privé et pas du rail, ils se connaissaient avant de s'opposer, à distance, au sujet du tracé de la ligne à grande vitesse.
D'un côté de la voie, Henri Tandonnet, maire de Moirax, président de la communauté de Laplume en Brulhois - le fuseau des 1 000 mètres y passe -, ancien président de feu le Syndicat mixte de l'Agenais et défenseur de la LGV. De l'autre côté du ballast, Charles D'huyvetter, président de l'association Très grande vigilance en Albret, chef d'entreprise, et l'un des porte-paroles de la Coordination 47. Douze associations qui militent pour une ligne à grande vitesse, mais sur les lignes existantes, et sans nouvelle gare.
Qui a raison, qui a tort ? Les deux mon général. Le premier met en avant l'avenir économique, l'impact d'une gare TGV pour Agen et sa région. Le second dénonce le « lobby » des politiques et des « grands groupes du bâtiment et des travaux publics. »
Ce soir, nouvelle réunion publique à Roquefort, organisée par les opposants à la LGV. Depuis le 11 janvier, date à laquelle la bande des 1 000 mètres a été rendue publique, les anti-LGV multiplient les rendez-vous, « l'information au public, pour que les riverains sachent ce qui les attend. »
Ce matin, Charges D'huyvetter et une délégation de la coordination départementale ont rendez-vous dans le bureau du préfet. Bernard Schmeltz est depuis peu en fonction dans le département mais c'est pour ce représentant de l'État comme pour le Lot-et-Garonne l'un des enjeux des vingt prochaines années. Si tout va bien, ou mal, ouverture de la ligne à l'aube des années 2 020. En dix ans, le combat peut aussi s'inviter dans les tribunaux.
Henri Tandonnet, maire de Moirax, président de Laplume en Brulhois
« Le tracé du TGV et son éventualité ne datent pas d'hier puisque c'est en 1992 que le premier tracé a été élaboré. On savait dès cette époque que la bande des 20 kilomètres définie à ce moment-là allait avoir un impact sur toute la zone au sud d'Agen. Le schéma de développement de l'Agenais a arrêté ce tracé, comme il prévoyait les déviations de Foulayronnes, de Beauregard. 90% des communes l'ont alors inscrit dans leur plan local d'urbanisme. Aujourd'hui, on est sur ces bases même si en fonction du Grenelle de l'environnement pas exemple, le fuseau définitif ne sera pas exactement celui qui avait été défini au préalable. Le combat que je mène, c'est de permettre un impact minimum pour la population mais avoir une gare LGV entre Toulouse et Bordeaux, c'est se retrouver sur les grandes lignes ferroviaires européennes, vers l'Angleterre, le bassin méditerranéen. C'est l'avenir du territoire pour le XXIe siècle et ce n'est pas possible sur la ligne actuelle que l'on devra utiliser pour le fret et les transports régionaux. Je ne reproche pas aux riverains de se défendre et ils peuvent compter sur moi. Mais c'est mal les préparer que de leur affirmer que le TGV ne passera pas. »
Charles D'huyvetter, président de Très Grande Vigilance en Albret
« Construire une gare nouvelle, c'est une hérésie totale. Le seul intérêt pour la SCNF, c'est de pouvoir y passer à 300 km/h. Au début oui bien sûr, les arrêts annoncés seront effectifs. Mais par manque de rentabilité et c'est à prévoir, il s'en arrêtera de moins en moins. Je suis chef d'entreprise et si on me prouve l'impact de cette ligne à grande vitesse pour l'économie du département, je dis oui immédiatement mais je suis persuadé du contraire et personne n'est arrivé à prouver que l'impact d'une ligne à grande vitesse allait dans le sens du développement dans des départements ruraux comme le nôtre. Tout ceci est une histoire de lobby entre les politiques et les grandes entreprises du BTP (bâtiment et travaux publics, NDLR) mais nous n'avons, ici en Lot-et-Garonne comme les voisins du Tarn-et-Garonne, aucun intérêt. Imaginez qu'entre Bordeaux et Agen, on ne gagnerait que quatre minutes. C'est sur ces arguments entre autres que l'on poursuit notre campagne d'information auprès des riverains. Nous avançons, mais Réseau Ferré de France (le maître d'œuvre, NDLR) avance plus vite que nous. D'autres associations vont se créer, j'espère, à Brax, Roquefort, au Passage aussi. »